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“Le lobby de la Mémoire contre Faurisson”

Article, ici remanié, de Valentin Héciak
paru dans Rivarol, le 14 mars 2018, p. 6-7

[Le remaniement auquel il a fallu procéder, avec le plein accord de l’auteur, a eu pour but principal de fournir au lecteur des liens hypertextes et pour but accessoire de permettre quelques additions ou corrections]

Le 1er mars 2018 se tenait à la cour d’appel de Paris, dans l’exiguë salle Jules Grévy, le procès intenté : 1) à Robert Faurisson, professeur d’Université à la retraite, ayant pour avocat Me Damien Viguier, et 2) à son « complice » Patrick D’Hondt, ex-animateur de Meta TV, ayant pour avocat Me Wilfried Paris. Les deux accusateurs, absents, sont 1) l’ancien président de la LICRA, Alain Jakubowicz, ayant pour avocat Me Laureen Kraftchick, et 2) le président du BNVCA (Bureau National de Vigilance Contre l’Antisémitisme), Sammy Ghozlan, ayant pour avocats Me Léa Fiorentino et Me Laurence Levy. La vidéo incriminée est un entretien accordé par R. Faurisson au «souriant et sympathique Patrick D’Hondt» et publié sur Internet le 12 septembre 2014. Six passages en sont notamment poursuivis.

MAUVAISES SURPRISES EN SÉRIE

Les prévenus sont convoqués à 13h30 mais la cour ne daignera faire son apparition qu’à 13h50. La banquette réservée au public (« le peuple français » !) ne peut accueillir qu’une douzaine de personnes. L’audience s’ouvre sur un coup de théâtre : Me Paris annonce qu’il vient d’être suspendu du barreau pour 18 mois et qu’il ne pourra donc assurer la défense de son client. Pierre Dillange présidera l’audience, assisté d’Anne-Marie Sauteraud et de Sophie-Hélène Chateau. Le greffier est Maria Ibnou Touzi Tazi et l’avocat général, Isabelle de Trentinian.

Dépourvu d’avocat, P. D’Hondt demande un renvoi de l’audience. Après une tentative d’explication de Wilfried Paris sur les raisons pour lesquelles il vient de perdre pour un temps le droit d’exercer, tentative abrégée par le président, une avocate de la partie civile intervient en expliquant que ce dossier est un « dossier simple » et qu’en conséquence « Monsieur D’Hondt peut s’expliquer seul ». La Cour se retire cinq minutes et décide de finalement maintenir l’affaire. P. D’Hondt n’aura tout simplement pas d’avocat ! Il est 14h07. Autre mauvaise surprise : la Cour décide qu’un procès va se dérouler en priorité avant le procès Faurisson/D’Hondt, celui d’un quidam accusé et condamné pour injures privées envers une dame. L’affaire va durer cinquante longues minutes. Une façon comme une autre d’écourter d’avance le temps de parole des coupables d’avance.

Le procès Faurisson/D’Hondt commence donc à 15h00. L’affaire de la Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qu’avait déposée Me Paris sur la loi Gayssot oblige la Cour à se retirer à nouveau. A 15h23, celle-ci annonce la mise en délibéré de la QPC au 15 mars. La parole est enfin accordée à P. D’Hondt à 15h37. Ce dernier déclare qu’il ne pouvait avoir compétence pour décider à l’avance si le professeur Faurisson allait tenir ou non des propos délictueux. Selon lui, seul un tribunal aurait eu la compétence nécessaire pour juger de tels propos. Au président, qui lui demande pourquoi avoir invité Robert Faurisson, il répond que cette invitation s’inscrivait dans le cadre de la liberté d’expression et qu’il tenait, par souci de neutralité, à donner la parole à diverses personnalités. A l’avocat général qui lui demande une liste d’autres invités, il répond en donnant des noms qui témoignent de son éclectisme. Il conclut : « Un journaliste doit inviter tout le monde ». Un conseiller lui reproche alors de ne pas avoir apporté la contradiction à Robert Faurisson au cours de l’entretien ; il répond qu’il ne se sentait pas suffisamment qualifié en la matière pour rétorquer aux propos du professeur.

Au reproche qu’on lui fait de n’avoir pas la qualité de journaliste professionnel, il répond qu’il se définit comme un « journaliste non professionnel ». Laureen Kraftchik lui fait remarquer que cet entretien a été donné « lors d’une fête chez Dieudonné », le « Bal des Quenelles » organisé chaque année par l’humoriste. Il dit qu’invité à cette fête il y a rencontré le professeur et que leur rencontre lui a seulement permis d’établir par la suite une liste de questions à poser lors d’un véritable entretien. Il lui vient cette formule : « Le problème en France, c’est la LICRA » ; il ajoute que la LICRA est « une organisation néfaste » et ne bénéficie « d’aucun soutien populaire ». Une avocate du BNVCA lui affirme qu’il aurait déclaré partager en tous points les conclusions de Robert Faurisson. Il s’en défend et précise qu’il ne s’agissait que du massacre de Katyn ; sur ce point il partageait les vues du professeur : à Nuremberg, l’accusation imputait ce massacre aux Allemands alors que les Alliés occidentaux savaient qu’il avait été le fait des Soviétiques. Evoquant ensuite Robert Badinter, il rappelle que cet ancien ministre de la Justice est hostile à la loi Gayssot. Il termine en déclarant que, pour sa part, il est contre toutes les lois liberticides telles la loi Pleven, la loi Gayssot ou la loi Taubira.

L’EXPOSÉ DU PROFESSEUR

À 16h07, la parole est enfin donnée à R. Faurisson. Convoqué à 13h30, âgé de 89 ans, il s’avance à la barre. Il a le choix entre répondre aux questions du président ou faire une déclaration, laquelle ne peut, en principe, être interrompue. Il choisit la déclaration. Le bon usage veut qu’en pareil cas, vu son âge (et ses graves ennuis de santé) on l’invite à s’exprimer assis. Avec Pierre Dillange, qui multipliera les signes d’une constante hostilité à son égard, il n’en est pas question. Le président l’interrompra à diverses reprises malgré les protestations de Me Viguier. Il n’écoutera le professeur que de temps à autre et parfois conversera avec l’un de ses conseillers, situé à sa droite.

Le professeur rappelle que ceux qui usent de la loi Gayssot (du 13 juillet 1990) osent prétendre que celle-ci n’a jamais empêché la libre recherche des historiens honnêtes. Il se tient pour un historien honnête ; or, pour sa part, depuis 1979, c’est-à-dire depuis 39 ans, il n’a jamais pu exposer librement le résultat de ses recherches et aucun de ses opposants n’a accepté son offre d’un débat public. En 1980 il a résumé ses découvertes en une phrase de soixante mots : « Les prétendues chambres à gaz hitlériennes et le prétendu génocide des juifs forment un seul et même mensonge historique, qui a permis une gigantesque escroquerie politico-financière dont les principaux bénéficiaires sont l’Etat d’Israël et le sionisme international et dont les principales victimes sont le peuple allemand – mais non pas ses dirigeants – et le peuple palestinien tout entier. »

L’ARRÊT DE LA COUR D’APPEL DE PARIS DU 26 AVRIL 1983

Faurisson rappelle avec insistance l’importante décision de la cour d’appel de Paris, c’est-à-dire l’arrêt du 26 avril 1983 mettant fin à un procès qui lui avait été intenté en 1979 par des organisations juives pour « dommage à autrui » par « falsification de l’histoire ». Cet arrêt avait été rendu par la première chambre de la cour d’appel civile de Paris, section A. Les magistrats avaient alors prononcé que, dans les thèses et les publications du professeur sur les chambres à gaz hitlériennes, ils ne trouvaient aucune justification aux quatre accusations portées à son encontre. Sur ce sujet, la cour n’avait trouvé 1) aucune trace de légèreté, 2) aucune trace de négligence, 3) aucune trace d’ignorance délibérée, 4) aucune trace de mensonge. Par voie de conséquence, les magistrats avaient décidé que « La valeur des conclusions défendues par M. Faurisson [sur le problème de l’existence et du fonctionnement des chambres à gaz nazies] relève donc de la seule appréciation des experts, des historiens et du public ». Ce qui signifiait qu’en France tout individu devait se voir reconnaître le droit de dire éventuellement que ces armes de destruction massive n’avaient pas existé ni même pu exister.

Le professeur demande alors si la loi Gayssot, votée en 1990, soit sept ans plus tard, peut effacer des conclusions qui ont été rendues en 1983. Evidemment, non. Faurisson souligne un extraordinaire paradoxe : dans le cas d’un assassinat quelconque, jamais un magistrat instructeur n’ira se contenter de témoignages mais toujours ordonnera prioritairement une expertise médico-légale de la scène de crime et de l’arme du crime ; or il se trouve qu’à la libération des camps allemands, nulle enquête de ce genre n’a été ordonnée à l’exception du premier camp à l’Ouest où les Alliés soient entrés, celui du Struthof (Alsace) ; et – surprise ! – l’enquête qu’y a menée le professeur René Fabre sur la prétendue chambre à gaz a abouti, le 1er décembre 1945, à des conclusions négatives.

Faurisson explique ensuite au tribunal ses travaux sur les écrits de Johann Paul Kremer. Ce dernier était médecin remplaçant à Auschwitz-Birkenau en 1942. Il y a tenu un journal dans lequel il note qu’à quinze reprises il a été présent à une « action spéciale » (Sonderaktion). Le grand « chasseur de nazis » Serge Klarsfeld prétend voir dans ces actions spéciales des gazages de masse ! Faurisson rappelle au tribunal sa spécialité dans l’étude des textes. Klarsfeld avait en fait falsifié un passage du journal de Kremer : le médecin y précisait, avec le mot de « draußen », que ces « actions » se passaient dehors ou au-dehors. Dès lors, comment croire que ces actions spéciales pouvaient signifier des gazages ? Klarsfeld ne s’était pas embarrassé de scrupules : il avait froidement escamoté le mot qui le dérangeait, celui de « draußen », et avait écrit que l’action spéciale en question se déroulait «dans les chambres à gaz».

« LES VICTOIRES DU RÉVISIONNISME »

Le professeur continue en citant d’autres « victoires du révisionnisme ». Par exemple, dès 1951, l’historien juif Léon Poliakov avait dû admettre que, pour la «campagne d’extermination des juifs», « aucun document n’est resté, n’a peut-être jamais existé ». Le professeur, quant à lui, précise que, pour les dirigeants allemands, en matière de « solution finale » de la question juive, il n’existait qu’une Solution finale territoriale (eine territoriale Endlösung). Cette formule est bien trop souvent amputée de l’adjectif « territoriale » et l’on s’imagine alors que « Solution finale » signifiait « extermination des juifs ». Certes il y avait eu une volonté de mise au ban des juifs et d’émigration consentie ou forcée. Le régime national-socialiste a en effet souhaité l’émigration des juifs, mais non en Palestine, ne voulant pas se «prêter à une indécence telle que d’envoyer de nouveaux juifs à ce pauvre peuple martyrisé par les juifs», disait Heinrich Himmler à Jean-Marie Musy, ancien président de la confédération helvétique, le 15 janvier 1945. Tout comme les États-Unis, qui demandaient 1 000 dollars pour chaque nouvel immigrant, le régime national-socialiste demandait 1 000 dollars à chaque personne souhaitant quitter définitivement le territoire allemand. Mais Himmler exigeait la garantie que les juifs remis aux Anglo-Saxons n’en profiteraient pas pour se rendre en Palestine.

Faurisson poursuit ses explications : en 1960, le Dr Martin Broszat, de l’Institut d’histoire contemporaine de Munich, écrivit que, contrairement à ce qu’on pouvait croire jusqu’alors, il n’y avait jamais eu de gazage homicide à Dachau, à Bergen-Belsen ou à Buchenwald. Dans ces camps surpeuplés aux derniers mois de la guerre, les morts étaient principalement imputables aux épidémies, notamment de typhus. En avril 1945, le camp de Bergen-Belsen, ravagé par les épidémies en provenance de l’Est, affamé, privé d’eau depuis quelques jours à cause des bombardements anglo-américains, était devenu un redoutable foyer d’infection. Aussi les autorités allemandes ont-elles envoyé en direction des troupes de Montgomery, qui approchaient du camp, une délégation pour les prévenir de la situation sanitaire (et probablement des risques pour tous, y compris la population allemande, si les internés étaient remis soudainement en liberté sans le moindre contrôle). Les Britanniques ont accepté de collaborer avec la Wehrmacht, mais non avec les SS, pour tenter de remédier à la situation. Puis, ils ont voulu ouvrir les nombreux charniers, compter les cadavres et, enfin, enfouir ces cadavres dans de vastes et profondes fosses. Pour repousser vers les fosses tous ces cadavres, ils ont utilisé un bulldozer. Dans un film tourné sur place on nous montre le bulldozer en action. Un choix de ces images est passé à la postérité, notamment grâce au documentaire (documenteur ?) Nuit et Brouillard (1955). Des millions de spectateurs ont cru voir là une preuve de ce que les Allemands, jour après jour, tuaient leurs détenus à une échelle industrielle. Rarissimes ont dû être les spectateurs capables de discerner que le chauffeur du bulldozer était un soldat anglais et non un soldat allemand. En 1978, un ouvrage publié en Afrique du Sud et destiné à contrecarrer toute révision de l’Holocauste présentait la photographie du bulldozer et des cadavres mais non sans l’amputer de la tête du conducteur, et cela dans l’intention manifeste de nous faire croire que le conducteur était allemand.

En 1968, l’historienne juive Olga Wormser-Migot publia une thèse sur Le Système concentrationnaire nazi – 1933-1945, thèse dans laquelle elle consacra quatre pages aux chambres à gaz sous le titre « Le problème des chambres à gaz ». Il y avait donc un problème, ici, celui de leur existence. Malgré l’abondance des témoignages, l’auteure conclut qu’il n’y avait jamais eu de chambre à gaz à Ravensbrück ni à Mauthausen. Le professeur raconte ensuite l’histoire du fondateur de l’Institut Yad Vashem à Jérusalem, l’historien israélien Ben-Zion Dinur. Celui-ci privilégiait une étude critique des témoignages de survivants, ce qui l’avait entraîné dans un conflit avec un puissant lobby souhaitant faire appel à la mémoire plutôt qu’à l’histoire ou à la science. Ce conflit le poussa à démissionner en 1959, six ans après la création de son institut. Faurisson relate ensuite l’histoire de sa propre publication dans Le Monde en 1978 et la déclaration de 34 historiens le 21 février 1979 selon laquelle :

Il ne faut pas se demander comment, techniquement, un tel meurtre de masse a été possible. Il a été possible techniquement puisqu’il a eu lieu. Tel est le point de départ obligé de toute enquête historique sur ce sujet. Cette vérité, il nous appartenait de la rappeler simplement : il n’y a pas, il ne peut y avoir de débat sur l’existence des chambres à gaz.

Quel aveu d’impuissance !, note le professeur. Alors qu’il s’apprête à continuer son exposé, le président l’interrompt à 16h35. Faurisson n’a alors pu parler que 28 minutes. Son avocat, Me Viguier, expliquant que son client n’a fait que commencer sa déclaration, obtient que soit notée au plumitif l’interruption du président. Le président déclare vouloir s’en tenir à la forme : Monsieur Faurisson a-t-il, oui ou non, tenu les propos qui lui sont reprochés ? Il laisse au prévenu dix minutes pour conclure et reproche à Faurisson de chercher une tribune (« Le tribunal n’est pas une tribune », lui signale-t-il). Après quelques échanges avec Me Viguier, le président finit par octroyer vingt minutes supplémentaires au prévenu.

L’ASSAG FAIT CHOU BLANC

Ce dernier continue alors sur l’ASSAG, l’Association pour l’étude des assassinats par le gaz sous le régime national-socialiste. Celle-ci avait été fondée le 21 avril 1982 et se donnait pour mission de « rechercher et de contrôler les éléments apportant la preuve de l’utilisation des gaz toxiques par les responsables du régime national-socialiste en Europe pour tuer les personnes de différentes nationalités [et] contribuer à la publication de ces éléments de  preuve ». L’article 1 de ses statuts disposait que « La durée de l’Association est limitée à la réalisation de son objet. », c’est-à-dire qu’elle se dissoudrait d’elle-même quand elle aurait apporté la preuve de gazages homicides. Or, l’association, comportant à sa création quatorze membres dont Germaine Tillion, Georges Wellers, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Me Bernard Jouanneau et Pierre Vidal-Naquet, s’est dissoute en 2014 sans jamais rien publier de son cru.

Du 29 juin au 2 juillet 1982 est organisé à la Sorbonne un colloque international visant à répliquer solennellement et publiquement à Robert Faurisson. Les deux organisateurs sont Raymond Aron et François Furet. Lors de la conférence de presse, le dernier jour, les deux organisateurs annoncent publiquement que, « malgré les recherches les plus érudites », on n’a pas trouvé un ordre d’Hitler de tuer les juifs. Par ailleurs aucune mention n’est faite des chambres à gaz. Le 7 mai 1983, Simone Veil déclare à France Soir Magazine : « Chacun sait que les nazis ont détruit ces chambres à gaz » et « supprimé systématiquement tous les témoins. » Pas de preuve ni de témoins, mais des chambres à gaz tout de même !

En 1961, le spécialiste international de l’Holocauste, Raul Hilberg, évoque dans son volumineux ouvrage The Destruction of the European Jews (La Destruction des juifs d’Europe) deux ordres d’Hitler concernant l’extermination des juifs, sans donner aucune référence. Lors de la réédition de l’ouvrage en 1985, édition revue et « définitive », ces deux ordres disparaissent. En 1983, Hilberg avait déclaré lors d’une conférence à New York que le processus de destruction des juifs d’Europe s’était réalisé grâce à « une incroyable rencontre des esprits, une transmission de pensée consensuelle au sein d’une vaste bureaucratie » (an incredible meeting of minds, a consensus-mind reading by a far-flung bureaucracy). En 1985, au premier grand procès du militant révisionniste allemand Ernst Zündel, à Toronto, il confirmera cette ahurissante thèse mais se verra infliger une telle humiliation par la défense de Zündel qu’il refusera de témoigner au second procès en 1988.

En 1986, le professeur français Michel de Boüard, ancien résistant déporté et membre du Comité d’histoire de la Deuxième guerre mondiale, a déclaré que le dossier de l’histoire du système concentrationnaire allemand était « pourri par énormément d’affabulations, d’inexactitudes obstinément répétées, notamment sur le plan numérique, d’amalgames, de généralisations. » Arno Mayer, professeur d’histoire contemporaine à l’université de Princeton, écrira à propos des chambres à gaz nazies : « Les sources pour l’étude des chambres à gaz sont à la fois rares et non fiables ».

Le professeur cite ensuite les écrits de deux historiens français ; Eric Conan, qui écrira à propos de la chambre à gaz d’Auschwitz I visitée par des foules de touristes : « Tout y est faux », et Jacques Baynac, qui n’a pu que constater « l’absence de documents, de traces ou de preuves matérielles ».

En 2000, à la fin de l’ouvrage de Valérie Ignouet, Histoire du négationnisme en France, Jean-Claude Pressac, qui avait été un adversaire farouche des thèses révisionnistes, écrit, à l’instar de Michel de Boüard, que le dossier du système concentrationnaire est « pourri » et bon pour les « poubelles de l’histoire ». Faurisson cite ensuite l’universitaire canadien Robert Jan van Pelt qui, en 2009, déclare que «99% de ce que nous savons sur Auschwitz» ne trouve décidément « pas sa preuve matérielle sur place ».

Faurisson explique ensuite qu’il s’est rendu à Auschwitz pour la première fois en 1975. Demandant à un expert du Musée d’Etat d’Auschwitz, Jan Machalek, si la chambre à gaz et les fours crématoires d’Auschwitz I étaient authentiques, il se vit d’abord répondre que oui, puis, pressé de questions, l’expert dut admettre qu’il s’agissait de reconstructions d’après-guerre. Faurisson lui avait dit : « Donc, vous avez des plans ? Où sont ces plans ? ». La réponse avait été que Tadeusz Iwaszko, responsable des archives, détenait ces plans. Le 19 mars 1976, de retour à Auschwitz, Faurisson trouva les plans des cinq crématoires d’Auschwitz et de Birkenau et découvrit que les prétendues chambres à gaz homicides n’étaient en réalité que d’inoffensifs dépositoires (Leichenhalle ou Leichenkeller).

Le professeur narre ensuite sa rencontre avec « le spécialiste américain des chambres à gaz homicides », à l’époque où, aux Etats-Unis, l’on exécutait encore les condamnés à mort par le gaz cyanhydrique. Il cite ensuite le procureur du procès de Nuremberg Robert Jackson qui rappelait que ce procès se devait d’être « la continuation de l’effort de guerre des Nations Alliées ». Il rappelle également l’article 19 du statut du tribunal de Nuremberg : « Le Tribunal ne sera pas lié par les règles techniques relatives à l’administration des preuves. Il adoptera et appliquera autant que possible une procédure rapide et non formaliste et admettra tout moyen qu’il estimera avoir une valeur probante » et, plus fort encore, l’article 21 disposant que : « Le Tribunal n’exigera pas que soit rapportée la preuve de faits de notoriété publique, mais les tiendra pour acquis. […] »

Sur la libération d’Auschwitz, le professeur avait demandé à des amis russophones de chercher dans les archives de la Pravda des informations sur cette libération. L’Armée rouge entre à Auschwitz le 27 janvier 1945, mais rien ne sera publié dans la Pravda jusqu’au 1er février, où un petit communiqué évoquera cet événement. Le 2 février 1945, un long article attestera de ce qu’à Auschwitz les victimes, tuées à l’électricité, tombaient sur un tapis roulant qui les transportait jusqu’au sommet d’un haut-fourneau pour y être brûlées !!!

Faurisson déclare ne pas accuser « les juifs » d’avoir inventé ce qu’il appelle « le bobard des chambres à gaz ». Les coupables ont été, selon lui, les membres d’une officine britannique de propagande, en charge de « planter » à l’étranger des rumeurs d’atrocités dans le cadre d’une opération appelée Sib, du latin sibilare (siffler, chuchoter).

A 17h, le président interrompt Faurisson une nouvelle fois en lui indiquant que son temps de parole est épuisé. Le prévenu et son avocat protestent solennellement. Le prévenu, en particulier, avait réservé pour la fin les points les plus importants de sa défense. Néanmoins la parole est donnée aux parties civiles.

« VOUS ÊTES UN DÉLINQUANT ET UN MENTEUR » !

La LICRA plaide en premier, déclarant que « cette audience a été une épreuve » et remercie le président d’avoir interrompu l’exposé du prévenu. L’avocate déplore que Faurisson se serve du procès comme d’une tribune. Elle a passé un « moment désagréable » en écoutant la plaidoirie de Faurisson. Sur Faurisson, elle constate «l’absence de remise en cause» qui transparaît sur son blog et que les condamnations n’ont aucun effet sur lui. L’infraction de contestation de crime contre l’humanité ne fait, selon elle, pas débat. Elle déplore la popularité d’une vidéo qui a dépassé, avant sa suppression du site Meta TV, les 80 000 vues. « Monsieur Faurisson, vous êtes un délinquant et un menteur », lance-t-elle. Mais elle ne cite aucun mensonge. Elle trouve que la Justice « fait preuve d’une clémence inédite malgré ses récidives » et s’inquiète que l’écho de Faurisson ne se limite plus aux seuls lecteurs de Rivarol. Elle s’indigne ensuite du chèque adressé par Patrick D’Hondt à la LICRA, chèque «d’un milliard de quenelles». Enfin, tout en ayant précisé que, selon elle, le prévenu ne s’arrêtera jamais de lui-même, elle espère qu’« il n’y aura plus beaucoup de nouvelles occasions de dire le droit à Monsieur Faurisson ».

Le président prend ensuite la parole pour préciser que Faurisson n’a été condamné qu’une fois à une peine de prison ferme, à « Fribourg » (sans préciser le pays). Quand le prévenu, tentant de fournir des informations pertinentes sur cette condamnation, évoque un point très particulier du système judiciaire helvétique (l’on apprend alors, par Faurisson, qu’il s’agit de Fribourg en Suisse), le président l’interrompt sèchement et lui refuse le droit de s’expliquer. Le ton monte, le président ordonne aux gardes de se saisir du vieil homme et de l’expulser. Me Viguier apaise les esprits et fait remarquer que les parties civiles agressent son client dans leurs plaidoiries.

Faurisson ne sera finalement pas expulsé, mais n’aura pas pu s’expliquer sur sa condamnation de Fribourg. La réalité est que, selon le droit helvétique, il avait été condamné à de la prison ferme (30 jours) et à une amende suite à la diffusion en Suisse par un inconnu, sur papier, de l’un de ses écrits. Il faut savoir qu’il n’avait été auparavant ni convoqué ni entendu ; il n’y avait pas eu de procès ; on lui laissait seulement après coup la possibilité d’interjeter appel !

A 17h18, une avocate du BNVCA commence sa plaidoirie. Elle remercie également le président d’avoir interrompu Faurisson. Elle rappelle la loi et signale que le BNVCA «sera là à chaque fois», qu’il ne sera plus jamais question de laisser passer de pareils propos et que « Monsieur Faurisson est largement obsédé par ce problème ». Interpellant les juges, elle leur lance : « Vous ne pouvez plus faire la sourde oreille ». Elle se plaint, à son tour, de ce que « la Justice ne passe pas de manière ferme concernant Faurisson » (sic). A 17h25 vient le tour de l’avocat général. Celle-ci justifie la nécessité de la loi Gayssot par la montée de l’antisémitisme en France. «Ce sont toujours les mêmes propos reprochés à Faurisson» sur l’impossibilité technique, sur l’acide cyanhydrique, les chambres froides, l’absence de documents… Elle compare le régime national-socialiste à d’autres tyrannies qui, elles, « ne s’encombrent pas de documents pour oppresser leur peuple » (sic). Après avoir signalé que la loi Gayssot n’empêche certainement pas le travail d’historien, elle demande de valider le jugement de première instance condamnant Robert Faurisson à 100 jours amende à 100 euros par jour et son complice Patrick D’Hondt à 100 jours-amende à 10 euros par jour, sans compter diverses sommes à verser aux parties civiles.

« CE N’EST PAS AUX MAGISTRATS DE DIRE L’HISTOIRE ! »

A 17h38, la parole est donnée à Me Viguier. Après avoir soulevé des problèmes de procédure et demandé la prescription pour son client, il rappelle l’objet du procès. Les faits reprochés à son client caractérisent-ils une contestation de crimes contre l’humanité ? Me Viguier regrette l’interruption du président, n’ayant pas laissé suffisamment de temps à son client pour se défendre. Après avoir évoqué l’article de Robert Faurisson publié dans Le Monde en 1978 et la réponse de l’aréopage d’historiens lui ayant répondu en 1979, l’avocat de la défense rappelle qu’en France, selon la jurisprudence, ce n’est pas aux magistrats de dire l’histoire. Les magistrats n’ont pas à juger la méthode d’un historien, ce jugement étant réservé à ses pairs. Si, en première instance, un jugement du 8 juillet 1981 avait condamné Robert Faurisson pour avoir manqué de prudence et de circonspection, l’arrêt du 26 avril 1983 rendu par la cour d’appel de Paris censure la décision des premiers juges et prononce qu’il n’est pas permis de conclure que M. Faurisson s’est rendu coupable d’« omissions » [en réalité, la cour, ainsi qu’on l’a vu, est allée bien plus loin puisqu’elle n’a trouvé chez l’intimé ni légèreté, ni négligence, ni ignorance délibérée, ni mensonge ; elle a même déclaré qu’en conséquence tout le monde devait avoir désormais le droit de reprendre à son compte ce que celui-ci avait dit et écrit sur les chambres à gaz nazies. – Note de RF]. Me Viguier rappelle ensuite que les historiens eux-mêmes contestent la légitimité du nombre de six millions de juifs morts et l’existence d’un ordre écrit d’Hitler de tuer les juifs d’Europe ; il souligne également le fait que l’on n’explique pas en quoi exactement les propos incriminés contreviennent à la loi. Par ces motifs, il demande la relaxe pour son client.

« LA HAINE N’EST QU’UNE PERTE DE TEMPS »

A 18h11, Faurisson reprend la parole pour la dernière fois. Il raconte que, lorsqu’il était écolier, il avait, à l’âge de treize ans, le soir du 22 juin 1942, entendu à la radio Pierre Laval dire qu’il souhaitait la victoire de l’Allemagne car, autrement, ce serait la victoire du bolchevisme en Europe. Le lendemain, il avait gravé au couteau sur son pupitre : « Mort à Laval », avec tous les risques qu’il encourait du fait de la nationalité britannique de sa mère. Mais, près de deux ans plus tard, le 8 mai 1945, à Paris, entendant sonner les cloches de la victoire, il avait, pour la première fois, éprouvé de la compassion pour son adversaire terrassé.

« La haine n’est qu’une perte de temps », dit-il à la cour. Il le rappelle pour conclure que jamais, selon lui, on n’a été capable de lui fournir « une preuve, une seule preuve » de ce crime d’une extermination perpétrée dans des chambres à gaz. Le président l’interrompt et lui retire définitivement la parole, en lui reprochant de s’être à nouveau aventuré sur le terrain des preuves matérielles.

Patrick D’Hondt termine en prenant la parole à 18h17 et maintient qu’il n’a eu aucune compétence pour juger d’éventuels propos délictueux à la place d’un magistrat. Il persiste à défendre la liberté d’expression de chacun, évoquant par exemple le spécialiste de l’extrême-droite Jean-Yves Camus, qui le qualifie «d’animateur noir». Bien que l’adjectif employé par M. Camus puisse valoir à ce dernier des poursuites et certainement une condamnation judiciaire pour « racisme » (en quoi est-il utile de préciser que Patrick D’Hondt est noir ?), D’Hondt ne le poursuivra pas, puisqu’il défend le droit à la libre expression pour tous.

L’audience se clôt à 18h25, soit quatre heures et trente-cinq minutes après son ouverture. Cette audience a peut-être été une épreuve pour les avocates de la partie civile, mais quid du vieux gentleman de 89 ans à qui le président n’a pas proposé une seule fois de s’asseoir pendant son exposé ?

Délibéré le 12 avril 2018.

14 mars 2018