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La révision de 1960 : il n’y a pas eu un seul “gazage” dans tout l’ancien Reich

(En particulier, ni à Buchenwald, ni à Dachau)

Remarque sur cette pièce : L’hebdomadaire Die Zeit, n° 34, du 19 août 1960, p. 16 (éd. américaine, n° 34, du 26 août 1960, p. 14) publiait une lettre du DMartin Broszat de l’Institut d’histoire contemporaine de Munich. Le titre choisi par l’hebdomadaire était : « Pas de gazage à Dachau ». Ainsi que le montre le contenu de la lettre, ce titre aurait dû être : « Pas de gazage dans tout l’ancien Reich » (Allemagne dans ses frontières de 1937).
 
Dans une lettre du 23 août 1974, le DMartin Broszat, devenu entre-temps directeur de son institut, et que j’interrogeais sur d’autres « chambres à gaz » que celles de l’ancien Reich, me faisait savoir qu’il ne pouvait me répondre. Il m’écrivait: « Une information qui se veut scientifique, sur le problème complexe [ou : compliqué] des chambres à gaz, ne peut se réduire à répondre à un catalogue de questions-pièges sur des points coupés de leur contexte. » C’était là une dérobade. Je ne vois pas en quoi une simple feuille de questions très simples ne pouvait recevoir de réponse. En quoi était-il difficile de répondre à des questions comme : « Pour vous, a-t-il, oui ou non, existé une ou des “chambre(s) à gaz” au Struthof ? à Mauthausen ? » ?
 
Retenons, en tout cas, que pour le DBroszat il existe un problème des chambres à gaz et que ce problème est même « complexe » (ou : « compliqué »). 
 
Relançant le DBroszat, je lui ai dit que je lui faisais grâce du reste et que je lui demandais seulement de répondre à la question suivante : pour lui, avait-il, oui ou non, existé une « chambre à gaz » homicide au Struthof ? Je n’ai jamais reçu de réponse à cette simple question. J’ai pourtant saisi jusqu’aux autorités officielles dont dépendait l’institut pour obtenir le droit d’avoir une réponse. Rien n’y a fait. Les autorités officielles ont cautionné le refus de réponse du DBroszat.
 
Aucun gazage à Dachau 
 
Ni à Dachau, ni à Bergen-Belsen, ni à Buchenwald des juifs ou d’autres détenus n’ont été gazés. La chambre à gaz de Dachau n’a jamais été complètement terminée et mise « en service ». Des centaines de milliers de détenus, qui périrent à Dachau ou dans d’autres camps de concentration situés à l’intérieur des frontières de l’ancien Reich, furent victimes avant tout des catastrophiques conditions d’hygiène et d’approvisionnement : rien que dans les douze mois allant de juillet 1942 à juin 1943, 110.812 personnes moururent de maladie et de faim dans tous les camps de concentration du Reich, d’après les statistiques officielles de la SS. L’anéantissement massif des juifs par le gaz commença en 1941-1942 et il prit place uniquement en de rares points choisis à cet effet et pourvus d’installations techniques adéquates, avant tout en territoire polonais occupé (mais nulle part dans l’ancien Reich) : à Auschwitz-Birkenau, à Sobibor-sur-Bug, à Treblinka, Chelmno et Belzec.
 
Là mais non à Bergen-Belsen, Dachau ou Buchenwald, furent érigés ces dispositifs d’anéantissement en masse, camouflés en douches ou en chambres de désinfection, dont il est question dans votre article.[1] Cette distinction nécessaire ne change assurément pas d’un pouce le caractère criminel de l’institution des camps de concentration. Mais peut-être peut-elle aider à supprimer la fatale confusion d’où il résulte que maints incorrigibles se servent d’arguments isolément justes mais séparés de leur contexte à des fins polémiques et [d’où il résulte aussi] que se hâtent d’y répliquer des gens qui assurément possèdent un exact jugement d’ensemble mais qui s’appuient sur des informations fausses ou défectueuses. 
Dr M. Broszat, Institut d’histoire contemporaine,
                                       Munich

 

[Publié dans Mémoire en défense contre ceux qui m’accusent de falsifier l’histoire, La Vieille Taupe, Paris 1980, p. 181-184.]

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[1] Allusion à un article publié la semaine précédente en première page de Die Zeit sous la plume de son rédacteur en chef, R. Strobel. Ce dernier avait violemment pris à partie le général américain Unrein qui avait, paraît-il, déclaré que la « chambre à gaz » de Dachau n’était qu’une douche. R. Strobel demandait que le général américain fût chassé d’Allemagne. On a là un exemple de la surenchère allemande dans les accusations portées contre l’Allemagne. Ce goût de surenchère atteint d’étonnantes proportions dans des domaines sans rapport avec le sujet tabou des « chambres à gaz ». Deux exemples : un marchand de jouets vendait des petits avions du modèle des avions allemands de la dernière guerre ; il est condamné pour leur avoir laissé l’insigne de la croix gammée ; le héros de la chasse allemande Hans Rudel publie Trotzdem ; aux États-Unis, le livre est vendu à deux millions d’exemplaires ; en Allemagne, il est mis à l’index (fait rapporté par Europäische Freiheitsbewegung, juin 1980, p. 1 : à vérifier). [NdA]