|

Loi Gayssot : Gaby Cohn-Bendit contre Pierre Nora

Le Choc du mois reprend des couleurs. Le directeur en est Jean-Marie Molitor et le rédacteur en chef, Bruno Larebière. Son adresse : 51, Boulevard Garibaldi, 75015 PARIS ; tél. : 09 79 04 09 96.

Sa livraison n° 27 (novembre 2008) contient, parmi d’autres articles qui attestent de recherches sérieusement menées, une étude de Patrick Cousteau, intitulée « Halte aux “compétitions mémorielles”! »

Pierre Nora et Françoise Chandernagor s’y voient remis à leur place et leur hypocrisie y est dénoncée. Ces bons apôtres ont, dans leur « Appel de Blois », affecté de se présenter en défenseurs de la « liberté pour l’histoire ». En réalité, ils sont en faveur de la loi Gayssot et veulent préserver celle-ci de « lois concurrentes ». La Shoah bénéficierait ainsi d’un privilège qu’ils jugent mérité. Quant aux révisionnistes, ils seraient, à en croire la romancière Françoise Chandernagor, « des imbéciles ».

P. Cousteau nous confirme que Jean-Gabriel Cohn-Bendit, lui, est resté « fidèle à ses convictions ». Il écrit:

Aux journées historiques de Blois, […] seul Gabriel Cohn-Bendit, qui n’avait pas été invité à participer au débat, est bruyamment intervenu depuis le public, pour remettre les choses à l’endroit : « Si on en est arrivé là, c’est parce que, dans les années 1980, nous avons introduit le droit pénal dans le débat historique ! Au lieu de punir les révisionnistes, il fallait s’opposer à eux sur leur terrain intellectuel ! Au lieu de lois, il fallait asséner des «arguments.» Le tonitruant frère de « Dany-le-rouge », fidèle à son engagement libertaire, continue de prôner une liberté d’expression totale, même pour les révisionnistes. « On ne comprend bien que ce qui s’exprime librement ! » Et de conclure que, pour sortir de la spirale infernale des compétitions mémorielles, il est désormais indispensable « d’abolir la loi Gayssot ».

 

On aura noté les deux phrases consécutives : « il fallait s’opposer à eux sur LEUR TERRAIN INTELLECTUEL ! » et « Au lieu de lois, il fallait asséner des ARGUMENTS ».

Il est exact qu’on n’a guère cherché noise aux révisionnistes sur le « terrain intellectuel » et qu’on ne leur a pas vraiment opposé ce qui peut s’appeler des «arguments», c’est-à-dire des «preuves à l’appui ou à l’encontre d’une proposition». Pierre Vidal-Naquet, Serge Klarsfeld et quelques autres s’y sont bien essayés pendant un temps mais leur entreprise a échoué dans de telles proportions que les Claude Lanzmann et autres cinéastes à la Spielberg ont décrété qu’il ne fallait plus ainsi entrer « dans le jeu des révisionnistes » ; selon eux, il convenait désormais de laisser parler « la Mémoire » et non « l’histoire ». Il fallait de l’émotion, de l’évocation, de l’imagination, des images, des films, du théâtre, des témoignages, des romans historiques, des récits, du story telling, des cérémonies, des pèlerinages « et même du kitsch » (sic). Ils ont été entendus et suivis. Quant aux révisionnistes de « l’Holocauste », baptisés « négationnistes », on les a traités de « gangsters de l’histoire » et on les a traînés en justice.

L’inconvénient de cette politique de la Mémoire (qui plus est, une Mémoire à majuscule et à sens unique) réside dans le fait que, pour reprendre le mot d’Alain Finkielkraut, les juifs peuvent apparaître à certains comme « les chouchous de la mémoire » et, à ce titre, susciter animosité ou jalousie (Le Monde, 9 mars 2008).

16 novembre 2008