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Texte du stupéfiant jugement rendu le 6 juin 2017 à mon encontre précédé du texte de mes premiers commentaires

Tribunal de Grande Instance de Paris,
17e chambre correctionnelle, 6 juin 2017

Président : Fabienne Siredey-Garnier. Assesseurs : Marc Pinturault et Caroline Kuhnmunch. Ministère public : Florence Gilbert. N° de parquet : 14356000489. Plaidoiries le 9 mai 2017. Robert Faurisson porte plainte pour diffamation publique contre Ariane Chemin, journaliste du Monde, et Teresa Cremisi, directrice de publication des Éditions Flammarion, pour avoir écrit et publié dans Le Monde / 70 ans d’histoire (août 2014, 496 p.) un article intitulé : 29 décembre 1978 / Le jour où Le Monde a publié la tribune de Faurisson (p. 469-470).

Le texte du jugement qui me déboute de mes demandes

Voyez ci-après les treize pages du jugement du 6 juin 2017 qui déclare recevable l’offre de preuve d’Ariane Chemin, renvoie Ariane Chemin et Teresa Cremisi des fins de la poursuite, déclare Robert Faurisson recevable en sa constitution de partie civile et le déboute de ses demandes en raison de la relaxe prononcée.

Mes premiers commentaires sur ce jugement

Me voici déclaré 1) un menteur, 2) un falsificateur et 3) un faussaire de l’histoire. De 1979 à 2017, soit en 38 ans, jamais une instance judiciaire n’a porté à mon encontre une seule de ces trois accusations. Si j’avais été vraiment condamné à l’un ou à l’autre de ces titres, les médias du monde occidental auraient immanquablement corné la nouvelle à tous les échos.

Mais il y a pire. Dans ce jugement, on ne me fournit pas un seul exemple, pas une seule preuve de ce que je serais effectivement soit « un menteur professionnel », soit un « falsificateur », soit un « faussaire de l’histoire ». J’attendais au moins trois exemples, trois preuves. Je ne découvre rien de tel.

Parce que j’ai souvent fait état du résultat de mes enquêtes sur les prétendues chambres à gaz hitlériennes et le prétendu génocide des juifs, et cela notamment dans une phrase de soixante mots, j’ai pu être condamné pour «diffamation raciale(!)», pour « dommage à autrui » (!), pour « contestation » (loi Gayssot) (!) ou pour tel autre motif, mais jamais je n’ai été condamné comme menteur professionnel, comme falsificateur ou comme faussaire de l’histoire. Certains de mes adversaires sont allés jusqu’à déplorer cet état de fait surtout quand, par exemple, un arrêt de la Cour d’appel de Paris, en date du 26 avril 1983, a rendu justice à la qualité de mes travaux sur les « chambres à gaz nazies ». J’ai, d’autre part, obtenu, par le passé, la condamnation de personnes déclarant que j’avais été condamné comme faussaire de l’histoire (tel a été le cas de l’avocat Bernard Edelman, docteur en droit, et du responsable du Recueil Dalloz-Sirey, « la bible des juristes », successivement en première instance, en appel et en cassation ; voy., par exemple, Le professeur Faurisson obtient la condamnation du Dalloz-Sirey, 23 novembre 1983).

L’explication, incroyablement biscornue, de mes juges se situe à la page 6 de leur écrit. Pour eux, les différentes juridictions qui, par le passé, se sont prononcées sur mon cas l’auraient fait en recourant à des « formulations et précautions stylistiques et méthodologiques » qui cachaient leur conviction profonde selon laquelle j’aurais « occulté et travesti la vérité historique ». Mes juges estiment que leurs précautionneux prédécesseurs n’auraient pas exprimé le fond de leur pensée ! Pendant 38 ans (de 1979 à nos jours), lesdits prédécesseurs auraient considéré que j’étais un homme qui avait « occulté et travesti la vérité historique » mais, pendant 38 ans, prenant toutes sortes de précautions, ils n’auraient pas osé et su le dire. Ici on attend une démonstration. On aimerait savoir comment, tout d’un coup, en 2017, mes juges auraient soudainement sondé les cœurs et les reins de leurs timides prédécesseurs. Quelles auraient été au juste ces « formulations » précautionneuses ? Ces « précautions stylistiques » ? Et surtout ces « précautions méthodologiques » qu’on a peine à imaginer vu le caractère jargonnesque de la formulation ? On aimerait surtout des démonstrations rigoureuses avec, d’une part, les phrases des anciens juges, d’autre part, leurs « précautions » et, enfin, la traduction précise de leur pensée profonde par de nouveaux juges, sans doute particulièrement pénétrants.

De quel droit le tribunal s’est-il dispensé de toute véritable démonstration ?

Il est arrivé que, portant plainte contre telle personne me traitant de « faussaire », j’aie été débouté. Tel a été le cas quand Robert Badinter a osé dire à la télévision qu’il m’avait fait condamner « pour être un faussaire de l’histoire ». Mais la vérité allait se révéler toute autre. En 2007, les juges de la XVIIe chambre du tribunal correctionnel de Paris ont expressément prononcé que l’ancien Garde des Sceaux avait « échoué en son offre de preuve » (p. 16 du jugement du 21 mai 2007), ce qui signifie que R. Badinter n’avait pas été capable de prouver que Faurisson avait été condamné en qualité de « faussaire de l’histoire ». R. Badinter n’avait échappé à une condamnation qu’au bénéfice de « la bonne foi » (sic). Dans ces conditions, les juges de la même chambre du même tribunal de Paris, cette fois-ci, en 2017, sous la présidence de Dame Siredey-Garnier ne peuvent  pas se prévaloir d’un tel jugement et l’invoquer pour conclure qu’il y avait là, dans ce jugement même de 2007, une preuve de plus de ce que Faurisson était au fond un faussaire de l’histoire, un faussaire stigmatisé comme tel par une instance juridictionnelle française. C’est pourtant ce qu’ont eu l’audace de faire ces juges, le 6 juin 2017.

Autre étrangeté : en 1990, le Parlement, avec la loi Gayssot (ou « loi Faurisson »), a soudain institué en délit le fait même de contester l’existence de la Shoah et des « chambres à gaz exterminatoires ». Soit ! Mais comment, le 6 juin 2017, le tribunal a-t-il pu ajouter que cette loi « confère nécessairement aux personnes persistant [dans la contestation] la double qualité de délinquant et de menteur » (p. 6) ? La qualité de « délinquant », certes, mais celle de « menteur », nulle part. On s’arroge le droit de qualifier de « menteur » celui qui ose « contester » la vérité révélée aux juges et par les juges de Nuremberg : serions-nous là face à l’application d’un dogme de nature religieuse, selon lequel celui qui persiste à douter est nécessairement de mauvaise foi ?

Le tribunal présidé par Dame Siredey-Garnier s’est lui-même permis de gravement falsifier le texte et le contenu de l’arrêt susmentionné du 26 avril 1983. Au bas de la page 8, citant un important passage de cet arrêt, il en interrompt subitement le cours et en omet froidement la si importante conclusion. Juste après les mots « plus de quatorze ans », suivis d’un point-virgule, la cour avait ajouté le considérant suivant : «  la valeur des conclusions défendues par M. Faurisson [sur les chambres à gaz nazies] relève donc de la seule appréciation des experts, des historiens et du public ». On aura noté la présence de la conjonction « donc ». Pour la cour, les recherches, les travaux, les conclusions de M. Faurisson en ce domaine sont si sérieux (car sans aucune trace soit de « légèreté », soit de « négligence », soit d’ignorance délibérée, soit, surtout, de « mensonge ») que tout le monde doit avoir le droit 1) de dire, tout comme Faurisson, que ces prétendues chambres à gaz nazies ne sont qu’un mensonge historique et 2), à plus forte raison, d’en débattre librement.

Comment des magistrats peuvent-ils ainsi pousser l’aplomb jusqu’à dénaturer par de tels escamotages le sens d’une décision de justice ? Il est inconcevable qu’un arrêt qui contient, dans l’une de ses parties, un pareil hommage à mon travail sur les prétendues armes de destruction massive d’Adolf Hitler contienne, au fond, l’idée ou l’accusation que je serais « un menteur professionnel », un « falsificateur » ou un « faussaire de l’histoire ». Il est tout aussi inconcevable qu’un jugement où il est dit que Robert Badinter a été incapable de prouver qu’il avait, en tant qu’avocat, fait condamner Robert Faurisson en qualité de « faussaire de l’histoire » contienne, au fond, l’idée que le même Robert Faurisson serait, lui, un « faussaire avéré de l’histoire ». Assurément des juges peuvent quelquefois exprimer au début de leur sentence un avis, puis, par la suite, exprimer sur tel autre point des réserves ou des critiques mais ils ne le feront pas au point d’aller jusqu’à s’infliger un pareil démenti ou jusqu’à tenir un discours aussi incohérent.

26 juin 2017

[Ces « premiers commentaires » devraient avoir prochainement une suite]


***

Tribunal de Grande Instance de Paris
17e chambre correctionnelle

Jugement du 6 juin 2017
N° minute : 3
N° parquet : 14356000489

Plaidoiries le 9 mai 2017
Prononcé le 6 juin 2017

JUGEMENT CORRECTIONNEL

PRONONCÉ à l’audience publique du Tribunal Correctionnel de Paris le SIX JUIN DEUX MILLE DIX-SEPT

Composé de :
Président :             Fabienne SIREDEY-GARNIER vice-président
Assesseurs :          Frédérique RIPOLL FORTESA vice-président
Marc PINTURAULT   juge
Ministère public :   Aglaë FRADOIS substitut
Greffier :              Martine VAIL greffier

DANS L’AFFAIRE PLAIDÉE à l’audience publique du Tribunal Correctionnel de Paris le NEUF MAI DEUX MILLE DIX-SEPT

Composé de :
Président :             Fabienne SIREDEY-GARNIER vice-président
Assesseurs :          Caroline KUHNMUCH vice-président
Marc PINTURAULT   juge
Ministère public :    Florence GILBERT substitut
Greffier :               Martine VAIL greffier

ENTRE :

Monsieur le PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE, près ce tribunal,

PARTIE CIVILE :

FAURISSON Robert
domicilié Cabinet d’avocats 125 rue de Tolbiac 75013 PARIS
[…] assisté de Me Damien VIGUIER […]

ET

[Page 2]

PRÉVENUE :

Nom :       CHEMIN
Prénom :   Ariane
[…] assistée de Me Catherine COHEN RICHELET […]              

Prévenue du chef de :
DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS PARTICULIER PAR PAROLE, ÉCRIT, IMAGE OU MOYEN DE COMMUNICATION AU PUBLIC PAR VOIE ÉLECTRONIQUE, faits commis le 24 septembre 2014 à PARIS

PRÉVENUE :

Nom :      CREMISI
Prénom :  Teresa
[…] représentée par Me Christophe BIGOT […]

Prévenue du chef de :
DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS PARTICULIER PAR PAROLE, ÉCRIT, IMAGE OU MOYEN DE COMMUNICATION AU PUBLIC PAR VOIE ÉLECTRONIQUE, faits commis le 24 septembre 2014 à PARIS

[Page 3]

PROCÉDURE

Selon ordonnance rendue le 9 février 2016 par l’un des juges d’instruction de ce siège, à la suite de la plainte avec constitution de partie civile déposée par Robert FAURISSON le 22 décembre 2014, Teresa CREMISI et Ariane CHEMIN ont été renvoyées devant ce tribunal sous la prévention:

Teresa CREMISI :

– d’avoir à Paris et sur l’ensemble du territoire national, le 24 septembre 2014, et en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, en qualité de directeur de publication, commis une diffamation publique envers un particulier pour avoir publié un article intitulé « 29 décembre 1978 – Le jour où “Le Monde” a publié la tribune de Faurisson » rédigé par Madame Ariane CHEMIN dans un ouvrage intitulé Le Monde, 70 ans d’histoire, paru aux éditions Flammarion et comprenant les propos suivants :

– « un menteur professionnel »
– « falsificateur »
– « faussaire de l’histoire »

propos comportant des allégations susceptibles de porter atteinte à l’honneur et à la considération de Robert FAURISSON, faits prévus et réprimés par les articles 23 alinéa 1, 29 alinéa 1, 32 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881.

Ariane CHEMIN :

– de s’être à Paris et sur l’ensemble du territoire national, le 24 septembre 2014, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, en qualité d’auteur, rendue complice du délit de diffamation publique envers un particulier reproché à Teresa CREMISI, pour être l’auteur de l’article intitulé « 29 décembre 1978 – Le jour où “Le Monde” a publié la tribune de Faurisson » dans un ouvrage intitulé Le Monde, 70 ans d’histoire paru aux éditions Flammarion et comprenant les propos ci-dessus reproduits,

faits prévus et réprimés par les articles 23 alinéa l, 29 alinéa 1, 32 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881.

Appelée pour fixation à l’audience du 15 avril 2016, l’affaire a été contradictoirement renvoyée aux audiences des 1er juillet 2016, 30 septembre 2016, 9 décembre 2016 et 9 mars 2017, pour relais, et 9 mai 2017, pour plaider.

DÉBATS

À cette dernière date, à l’appel de la cause, la présidente a constaté la présence de la partie civile et d’Ariane CHEMIN, prévenue, toutes deux assistées de leurs conseils, Teresa CREMISI étant, pour sa part, représentée par son avocat, puis elle a donné connaissance de l’acte qui a saisi le tribunal.

Les débats se sont tenus en audience publique.

La présidente a procédé à l’interrogatoire d’identité d’Ariane CHEMIN et l’a informée de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions

[Page 4]

qui l[ui] sont posées ou de garder le silence.

Puis elle a procédé à l’appel des témoins : se sont présentés, cités par Ariane CHEMIN au titre de son offre de preuve, Annette WIEVIORKA, Laurent JOLY et, à 14h15, Valérie IGOUNET.

Les témoins ont été invités à quitter la salle d’audience pour ne la rejoindre qu’au moment de leur déposition.

La présidente a instruit l’affaire, rappelé les faits et la procédure, procédé à l’audition de la partie civile, à l’interrogatoire de la prévenue présente ainsi qu’à l’audition, serment préalablement prêté, des trois témoins cités par la défense.

 Puis le tribunal a entendu dans l’ordre prescrit par la loi :

  •  Me VIGUIER, pour la partie civile qui a développé ses écritures ;
  •   la représentante du ministère public en ses réquisitions ;
  •  Me COHEN-RICHELET, pour Ariane CHEMIN, en ses moyens de défense et plaidoirie ;
  •   Me BIGOT, pour Teresa CREMISI, en ces moyens de défense et plaidoirie ;
  •   Ariane CHEMIN, prévenue, ayant eu la parole en dernier.

À l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré et la présidente, dans le respect de l’article 462, alinéa 2, du code de procédure pénale, a informé les parties que le jugement serait prononcé le 6 juin 2017.

*

À cette date, la décision suivante a été rendue :

MOTIFS

Le 29 décembre 1978 le quotidien Le Monde publiait une tribune de Robert Faurisson, alors maître de conférences à l’université de Lyon-II, intitulée « Le problème des chambres à gaz ou “la rumeur d’Auschwitz” ».

Dans cette tribune, l’auteur se félicitait de ce que le « silence » sur la question des chambres à gaz soit en train de se rompre et que la vérité se fasse progressivement jour sur le fait qu’il n’avait existé de « chambres à gaz »[1] qu’en cinq ou six endroits de Pologne et que ces « chambres à gaz » ne correspondaient en rien à la légende entretenue à dessein par « les appareils judiciaires polonais et soviétiques » de « véritables abattoirs humains ». Soutenant qu’une telle thèse était incompatible avec les lois élémentaires de 1a chimie, et soulignant qu’il n’existait aucun document sur ces « chambres à gaz », l’auteur concluait cette tribune en ces termes « Le nazisme est mort, et bien mort, avec son Führer. Reste aujourd’hui la vérité. Osons la proclamer. L’inexistence des « chambres à gaz » est une bonne nouvelle pour la pauvre humanité.

———————————

[1]  Les guillemets sont d’origine

[Page 5]

Une bonne nouvelle qu’on aurait tort de tenir plus longtemps cachée. ».

Le 21 août 2012, ce même journal publiait un article d’Ariane Chemin, intitulé « 29 décembre 1978 – Le jour où “le Monde” a publié la tribune de Faurisson », dans lequel l’auteur revenait sur les circonstances de la publication de la tribune de Robert Faurisson et le débat qu’une telle publication avait suscité en interne, rappelait les grandes lignes de la carrière de l’intéressé et critiquait par ailleurs personnellement l’initiative du Monde, la qualifiant de « bourde monumentale » qui avait contribué à la notoriété de Robert Faurisson et à la propagation, voire à la légitimation, de ses thèses, qualifiées de « délirantes », sur l’inexistence des chambres à gaz.

Poursuivie en justice par Robert Faurisson pour avoir écrit que celui-ci était un « un menteur professionnel », un « falsificateur » et un « faussaire de l’histoire », Ariane Chemin, par jugement de cette chambre du 16 janvier 2014, confirmé le 18 décembre 2014 par la cour d’appel de Paris, était relaxée, les poursuites ayant été engagées sur le fondement de 1’injure publique envers particulier alors que les propos incriminés se référaient à des faits précis, exclusifs de la qualification d’injure.

Le 24 septembre 2014, l’article d’Ariane Chemin du 21 août 2012 était publié sous forme de fac-similé dans l’ouvrage commémorant les 70 ans du Monde.

Robert Faurisson déposait à nouveau plainte avec constitution de partie civile le 22 décembre 2014 pour les propos déjà poursuivis lors de la première publication de l’article, mais cette fois-ci sur le fondement de la diffamation publique envers particulier.

Ariane Chemin et Teresa Cremisi, directrice de publication des éditions Flammarion, étaient respectivement mises en examen les 6 juillet et 5 octobre 2015.

Lors de l’audience, Robert Faurisson s’expliquait sur ses recherches et travaux. Il déclarait ainsi avoir exprimé la synthèse de sa pensée lors d’une émission de radio le 17 décembre 1980 en ces termes « … les prétendues chambres à gaz hitlériennes et le prétendu génocide des juifs forment un seul et même mensonge historique, qui a permis une gigantesque escroquerie politico-financière, dont les principaux bénéficiaires sont l’Etat d’Israël et le sionisme international et dont les principales victimes sont le peuple allemand – mais non ses dirigeants – et le peuple palestinien tout entier ». Il affirmait, par ailleurs, avoir, contrairement à ses détracteurs, les preuves de tout ce qu’il avançait, et soutenait que même les spécialistes les plus opposés à ses thèses, comme Raul Hilberg, étaient finalement convenus de l’impossibilité de démontrer l’existence à la fois d’un ordre aux fins d’extermination des juifs et des chambres à gaz aux fins d’extermination.

Son conseil plaidait en faveur de la condamnation des prévenues, l’offre de preuve n’étant selon lui pas recevable, son client n’ayant jamais été condamné, en toute hypothèse, pour avoir été un faussaire de l’histoire, les magistrats n’ayant fait que relever, dans les différents procès, la bonne foi de ses adversaires, et Ariane Chemin s’étant exprimée sans aucune prudence et avec malhonnêteté.

Le ministère public requérait la relaxe, les propos étant bien diffamatoires mais l’offre de preuve étant à la fois recevable et bien fondée.

[Page 6]

Ariane Chemin exposait, tout d’abord, les motifs l’ayant conduite à écrire sur la polémique engendrée par la publication de la tribune de Robert Faurisson, sujet pas ou peu abordé jusqu’alors et qui lui paraissait soulever d’intéressantes questions sur les limites de la liberté d’expression. Elle expliquait avoir énormément travaillé en vue de la rédaction de cet article, sachant à quel point le sujet abordé était sensible, et avoir d’ailleurs rencontré Robert Faurisson chez lui, à Vichy, durant l’été 2012, l’entretien s’étant bien passé au début mais l’ayant mise mal à l’aise dès lors que l’intéressé avait voulu lui montrer ses archives et tenté de la convaincre du bien-fondé de ses thèses sur la Shoah et les chambres à gaz. Elle ajoutait s’étonner, n’étant pas juriste mais se prononçant en tant que citoyenne, du fait que Robert Badinter, poursuivi par Robert Faurisson pour avoir déclaré le 11 novembre 2006 sur la chaîne de télévision Arte « … J’ai fait condamner Faurisson pour être un faussaire de l’histoire», n’ait été relaxé qu’au bénéfice de la bonne foi, alors même que la Shoah était pour sa génération un fait avéré qui ne souffrait aucune discussion.

Les trois témoins cités par ses soins estimaient que 1’emploi des termes poursuivis par Robert Faurisson se justifiait totalement.

Valérie Igounet, historienne, auteur d’une thèse sur le négationnisme et d’une biographie de Robert Faurisson, témoin lors du procès intenté en 2007 par Robert Faurisson contre Robert Badinter, déclarait considérer Robert Faurisson comme un professionnel du mensonge et de la falsification, avide de notoriété et adepte des provocations en tout genre. Elle affirmait que s’il ne fabriquait pas de faux documents, il partait systématiquement d’un postulat, celui du complot juif quant à l’existence de la Shoah afin de percevoir des réparations et parvenir à la création de l’État d’Israël, et s’arrangeait pour faire coïncider ses prétendues recherches et découvertes avec ce postulat, en tordant et tronquant si besoin la vérité.

Annette Wieviorka, historienne, directrice de recherches émérite au CNRS, auteur d’ouvrages sur Auschwitz et les procès de Nuremberg et d’Eichmann, également témoin lors du procès de 2007, confirmait avoir été choquée lors de la publication en 1978 de la tribune de Robert Faurisson, cet acte légitimant selon elle une falsification de l’histoire et un mensonge. Elle soulignait les approximations et les erreurs, toujours orientées dans le même sens, de la méthode de Robert Faurisson, estimant que le négationnisme, s’il avait sans doute poussé les véritables historiens à approfondir leurs recherches sur un fait tellement établi qu’il ne paraissait souffrir aucune contestation, et à préciser certains points, n’était que le « pilote » de la tendance actuelle aux « faits alternatifs », et insistait sur la propension de Robert Faurisson à toujours travestir la réalité à son avantage, transformant ainsi, en particulier, ses défaites judiciaires en victoires.

Laurent Joly, historien, directeur de recherches au CNRS, spécialiste de l’antisémitisme et de l’extrême-droite, précisait que, pour lui, il ne faisait aucun doute que Robert Faurisson se rattachait au milieu de « l’activisme antisémite, qui depuis l’affaire Dreyfus tente de se donner les apparences de la science pour justifier leur haine des juifs » et «  soumet(tait) la réalité à ses fantasmes ». Il déclarait que Robert Faurisson était bien à la fois, un « faussaire », au sens de « mystificateur » ou de « falsificateur », et un « menteur professionnel » – seul qualificatif adapté à un «homme qui depuis 40 ans nous dit que l’existence des chambres à gaz est matériellement impossible» –, se refusant à entrer dans ce qu’il qualifiait les «histoires absurdes de Faurisson», mais se disant inquiet que le négationnisme puisse prospérer avec la disparition des derniers témoins directs.

[Page 7]

Le conseil d’Ariane Chemin plaidait en faveur de la relaxe de sa cliente, estimant que celle-ci, de par les pièces et témoignages produits par ses soins dans l’offre de preuve, il avait démontré la réalité des imputations poursuivies, et pouvait à tout le moins bénéficier de l’excuse de bonne foi, en raison notamment de la base factuelle extrêmement solide dont elle disposait pour écrire son article.

Le conseil de Teresa Cremisi demandait également sa relaxe, sa cliente devant bénéficier, en sa qualité d’auteur au sens de la loi du 29 juillet 1881, de l’excuse absolutoire de vérité résultant des éléments fournis dans l’offre de preuve d’Ariane Chemin et sa bonne foi étant parfaitement établie, les Editions Flammarion, bien qu’en étant totalement solidaires, n’ayant au surplus jamais interféré dans les choix éditoriaux du Monde pour la conception de l’ouvrage.

SUR CE
SUR L’ACTION PUBLIQUE

La démonstration du caractère diffamatoire d’une allégation ou d’une imputation suppose que celles-ci concernent un fait précis de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne identifiée ou identifiable.

Si, comme en l’espèce, une offre de preuve de la vérité des faits diffamatoires est formulée, elle doit, pour produire l’effet absolutoire prévu par l’article 35 de la loi du 29 juillet 1881, être parfaite, complète et corrélative aux imputations dans toute leur portée et leur signification diffamatoire.

Les imputations diffamatoires peuvent, enfin, être justifiées lorsque leur auteur établit sa bonne foi, en prouvant qu’il a poursuivi un but légitime, étranger à toute animosité personnelle, et qu’il s’est conformé à un certain nombre d’exigences, en particulier de sérieux de l’enquête, ainsi que de prudence dans l’expression, étant précisé que la bonne foi ne peut être déduite de faits postérieurs à la diffusion des propos et que l’ensemble des critères requis est cumulatif.

Ces critères s’apprécient différemment selon le genre de l’écrit en cause et la qualité de la personne qui s’y exprime et, notamment, avec une moindre rigueur lorsque l’auteur des propos diffamatoires n’est pas un journaliste qui fait profession d’informer, mais une personne elle-même impliquée dans les faits dont elle témoigne.

 sur le caractère diffamatoire des propos

Il résulte de l’article d’Ariane Chemin qu’en qualifiant Robert Faurisson de « menteur professionnel », « falsificateur » et « faussaire de l’histoire », l’auteur a entendu dénoncer non pas un trait de caractère mais les mensonges sciemment proférés par la partie civile aussi bien, à titre principal, sur la question de la Shoah et des chambres à gaz exterminatoires, que sur des points plus accessoires, telles son appartenance à la gauche ou les circonstances de son interdiction d’exercer ses fonctions à l’université de Lyon-II et de l’agression consécutive dont il s’est dit victime.

[Page 8]

Il s’agit, par conséquent, de faits à la fois précis, un débat probatoire pouvant s’engager sans difficulté sur ces différentes questions, et attentatoires à l’honneur et à la considération, le fait de proférer des mensonges étant intrinsèquement contraire à la morale commune et étant d’autant plus vexatoire lorsque la personne ainsi qualifiée se prévaut de la qualité d’historien et de scientifique.

L’ensemble des propos poursuivis doit, par conséquent, être considéré comme diffamatoire.

sur l’offre de preuve

 sur la recevabilité de l’offre de preuve

Il est soutenu par le conseil de la partie civile que l’offre de preuve d’Ariane Chemin n’a pas été régulièrement délivrée à son client, celui-ci en ayant été informellement averti par le ministère public après l’expiration du délai de dix jours et le jour même où expirait le délai pour formuler une offre de preuve contraire.

Cet argument ne saurait toutefois prospérer, dans la mesure où il résulte des éléments versés aux débats que le ministère public a transmis le 14 mars 2016 à Me Yon, conseil de Robert Faurisson lors de l’instruction, l’offre de preuve formulée le 9 mars 2016 par Ariane Chemin, celle-ci ayant été citée à comparaître le 1er mars 2016 ; que par courriel du 14 mars, Me Yon a indiqué au ministère public ne plus être en charge des dossiers de Robert Faurisson, celui-ci confiant désormais ses intérêts à Me Viguier ; que ce dernier, dans une lettre du 25 mars 2016, a indiqué avoir averti le 10 mars 2016 le ministère public, la 17e chambre et ses confrères du changement d’avocat ; que toutefois la télécopie figurant au dossier mentionne qu’elle a été adressée au cabinet de Sabine Kheris, juge d’instruction dessaisie du dossier depuis l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel ; que, dans ces conditions, il ne saurait être fait grief au ministère public d’avoir notifié l’offre de preuve hors délai, Ariane Chemin ayant elle-même formulé son offre de preuve dans les délais requis et le ministère public, qui n’était d’ailleurs pas tenu de le faire, étant, aux termes de l’article 55, le seul destinataire de droit de l’offre de preuve, ayant également procédé à l’information de la partie civile dans les délais.

L’offre de preuve d’Ariane Chemin doit, par conséquent, être déclarée recevable.

 – sur la démonstration de la vérité des faits poursuivis

À titre liminaire, il convient de rappeler qu’en l’espèce, il incombe à la partie ayant invoqué le bénéfice de l’exception de vérité de démontrer que Robert Faurisson a, sciemment, falsifié la vérité en affirmant que la Shoah et les chambres à gaz n’avaient pas existé.

Au soutien de son offre de preuve de la vérité des faits, Ariane Chemin produit, outre les témoignages exposés ci-avant, des articles de presse, des extraits d’ouvrage et, principalement, une série de jugements et d’arrêts, ou d’extraits de ces décisions s’échelonnant entre le 8 juillet 1981 et le 18 décembre 2014, dont :

[Page 9]

– un extrait d’un arrêt de la cour d’appel de Paris du 23 juin 1982 opposant Robert Faurisson à la Ligue contre l’Antisémitisme (LICA) et la Société Amicale des Déportés. D’Auschwitz[2] déclarant Robert Faurisson coupable de diffamation publique à raison d’une appartenance à une ethnie, pour avoir nié le génocide hitlérien à l’égard des juifs et imputé des faits d’escroquerie et de mensonge à la communauté israélite;

–  un arrêt du 26 avril 1983 de la cour d’appel de Paris[3] condamnant Robert Faurisson pour des propos, dont certains extraits de la tribune du 29 décembre 1978, publiés dans différents quotidiens et l’arrêt de la Cour de cassation du 28 juin 1983 rejetant le pourvoi[4];

–  un arrêt de la cour d’appel de Paris du 16 janvier 1985[5] déboutant Robert Faurisson de l’action entreprise par ses soins contre Jean Pierre-Bloch à raison de l’allégation de « faussaire » proférée à son encontre dans l’autobiographie du prévenu ;

– un jugement de la 17e chambre du tribunal de grande instance de Paris du 14 février 1990[6] déboutant Robert Faurisson de son action en diffamation à l’encontre de Georges Wellers et du Centre de Documentation Juive Contemporaine pour une notice le présentant comme « …chef de l’école révisionniste en France, falsificateur de l’histoire des juifs pendant la période nazie » ;

– le jugement de la 17e chambre du tribunal de grande instance de Paris du 21 mai 2007[7] déboutant Robert Faurisson de son action en diffamation contre Robert Badinter à raison des propos selon lesquels il avait « fait condamner Faurisson pour être faussaire de l’histoire » ;

– le jugement de la 17e chambre du tribunal de grande instance de Paris du 16 janvier 2014[8], confirmé par l’arrêt du 18 décembre 2014 de la cour d’appel de Paris[9], relaxant Ariane Chemin et Louis Dreyfus pour les propos figurant dans l’article du 21 août 2012 objet de la présente poursuite ;

– les condamnations pour contestation de crime contre l’humanité prononcées les 20 avril 1991, 27 avril 1998 et 4 juillet 2006 à l’encontre de Robert Faurisson[10].

Selon Robert Faurisson et son conseil, ces différents éléments, et notamment les décisions des tribunaux et cours, ne démontreraient en rien la preuve de la vérité des allégations diffamatoires poursuivies, dans la mesure où elles n’ont jamais consacré le fait que son client soit un faussaire de l’histoire, n’ont été prises qu’au bénéfice de la bonne foi des personnes poursuivies, après avoir constaté qu’elles avaient échoué dans leur offre de preuve, et ont pour certaines d’entre elles consacré le bien-fondé et le sérieux de ses recherches.

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[2]   CfPJ Mme Chemin n° 8
[3]   CfPJ 9 Mme Chemin
[4]   CfPJ 10 Mme Chemin
[5]   CfPJ 11 Mme Chemin
[6]   CfPJ 12 Mme Chemin
[7]   Cf PJ 16 Mme Chemin, jugement non frappé d’appel
[8]   CfPJ 18 Mme Chemin
[9]   CfPJ 19 Mme Chemin
[10] CfPJ 13, 14 et 15 Mme Chemin

 [Page 10]

Toutefois, il résulte même de l’analyse de ces différentes décisions, et ce quelles que soient les formulations et précautions stylistiques ou méthodologiques retenues par les différentes juridictions s’étant prononcées, que Robert Faurisson a bien été condamné pour avoir occulté et travesti la vérité historique ; qu’il a, ainsi, été condamné pour ses déclarations sur « les prétendues chambres à gaz hitlériennes et le prétendu génocide des juifs» ; qu’il a été reconnu que le terme de « faussaire » utilisé à son endroit ne pouvait justifier la condamnation des personnes l’ayant employé, celles-ci s’étant exprimées « sans exagération, sans dénaturation de la vérité, avec objectivité et sincérité » ; que si plusieurs décisions ont cru bon de relever qu’il «  n’appartient pas aux tribunaux de juger de la véridicité des travaux historiques ou de trancher les controverses suscitées par ceux-ci et qui relèvent de la seule appréciation des historiens et du public », force est de constater d’une part que, s’agissant de la Shoah et des chambres à gaz exterminatoires, cette question a été vidée de sa substance par la loi Gayssot, qui institue en délit le fait même d’en contester l’existence, et, partant, confère nécessairement aux personnes persistant dans cette voie la double qualité de délinquant et de menteur, d’autre part que tout en affirmant ne pas vouloir se poser en historiens, les juges, par leur examen de la bonne foi, ont été néanmoins nécessairement amenés à se prononcer sur la validité des éléments historiques produits par les parties au soutien de leurs positions respectives ; qu’ils ont ainsi, notamment, relevé (les soulignements sont ajoutés) :

« … que, dans le cas d’espèce, M. Faurisson avait manqué à ses obligations en écartant par principe tous les témoignages contraires à sa thèse, en orientant son analyse des documents «dans le sens de la négation» et en se livrant « sur un ton messianique » à des proclamations « qui relèvent plus du discours politique que de la recherche scientifique » … que même dans l’exercice de son activité scientifique, et en particulier lors de la publication des résultats de ses travaux, tout historien demeure soumis envers autrui au principe de responsabilité édicté par les articles 1382 et 1383 du code civil… qu’une lecture d’ensemble des écrits soumis à la cour fait apparaître que M. Faurisson se prévaut abusivement de son travail critique, pour tenter de justifier sous son couvert, mais en dépassant largement son objet, des assertions d’ordre purement général qui ne présentent plus aucun caractère scientifique et relèvent de la pure polémique ; qu’il est délibérément sorti du domaine de la recherche historique et a franchi un pas que rien, dans ses travaux antérieurs n’autorisait, lorsque, résumant sa pensée sous forme de slogan, il a proclamé que « les prétendus massacres en chambres à gaz et le prétendu génocide sont un seul et même mensonge » ; que, par-delà la négation de l’existence des chambres à gaz, il cherche en toute occasion à atténuer le caractère criminel de la déportation, par exemple en fournissant une explication personnelle mais tout à fait gratuite des « actions spéciales » mentionnées à quinze reprises et avec horreur dans le journal du médecin Kremer… » (cour d’appel de Paris, arrêt précité du 26 avril 1983) ;

– que cette motivation est reprise dans le jugement rendu le 14 février 1990 par la 17e chambre du TGI de Paris, qui en outre, après avoir énuméré les documents fournis par Georges Wellers et le Centre de Documentation Juive Contemporaine en vue de la démonstration du « caractère délibéré de la politique, niée par les révisionnistes, menée par les nazis en vue de “l’anéantissement total des Juifs”, selon les termes utilisés le 13 mai 1942 par Theodor Dannecker “responsable des affaires juives” à Paris pour le compte de l’Office central de sécurité du Reich[11] », conclut que les « défendeurs… ont publié l’expression incriminée

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[11] Parmi lesquels des passages du procès verbal de Wannsee, les déclarations de Himmler, celles d’officiers nazis devant le tribunal international de Nuremberg, celles d’Eichmann à son procès.

[Page 11]

(“falsificateur de l’histoire des Juifs pendant la période nazie” de bonne foi, sans animosité excessive, dans le seul but légitime et conforme à la vocation du “Monde juif” d’exprimer leur appréhension à la perspective de voir se généraliser des conceptions relevant dans leur aboutissement, plus du discours politique que de la recherche scientifique » ;

– que, dans le jugement du 21 mai 2007 de la 17e chambre (cf. supra), il est noté :

 tout d’abord que si le jugement du 8 juillet 1981 « ne peut constituer la preuve parfaite et corrélative de la vérité du fait diffamatoire », de même que les autres éléments fournis à titre d’offre de preuve, même s’ils « démontrent qu’au sein de la communauté scientifique, les méthodes du demandeur sont assimilées à celles d’un faussaire et que ses productions, non seulement ne bénéficient d’aucun crédit, mais sont unanimement condamnées, pour leur absence totale de sérieux et en ce qu’elles caractérisent des contestations de crimes contre l’humanité », il y est toutefois relevé, dans l’analyse relative à la bonne foi des défendeurs, « qu’il résulte clairement des termes de cette décision (le jugement du 8 juillet 1981)… que le tribunal, s’il s’est interdit de consacrer judiciairement et expressément une vérité historique, ce qui l’a conduit à refuser de rechercher si le discours de Robert Faurisson « constitue ou non une “falsification de l’histoire” », « a imputé à faute à celui-ci de graves manquements aux obligations qui incombent aux historiens…» ;

que dans l’arrêt du 26 avril 1983 « la cour dénonçait, elle aussi, le glissement de Robert Faurisson vers “des assertions d’ordre général qui ne présentent plus aucun caractère scientifique et relèvent de la pure polémique ; elle affirmait, se faisant juge de la qualité de ses productions, qu’en niant ensemble l’existence des chambres à gaz et du génocide, il a franchi un pas” que rien dans ses travaux antérieurs n’autorisait » ;

que « la cour d’appel comme le tribunal, tout en refusant de juger l’histoire et de dire la vérité, n’ont donc à aucun moment remis en cause les acquis de celle-ci et ont au contraire fondé la condamnation civile prononcée contre Robert Faurisson, non sur des considérations morales, comme celui-ci le soutient à tort, mais bien sur la responsabilité professionnelle encourue par lui vis-à-vis du public, en tant «qu’universitaire et en sa qualité revendiquée d’historien, à tenter d’appuyer sur une prétendue recherche critique à caractère scientifique et historique – les juges ayant analysé les vices affectant la méthode qu’il revendiquait – sa volonté de nier les souffrances des victimes du génocide des juifs, de réhabiliter les criminels nazis qui l’ont voulu et exécuté… » ;

que « Robert Badinter, en retenant de ces décisions, plutôt que l’analyse portant sur le but poursuivi par Robert Faurisson, celle relative à la méthode suivie par lui, et en la ramassant dans la formule, dont la pertinence résulte de ce qui précède, de « faussaire de l’histoire », rassemblant ainsi des termes qu’il avait déjà appliqués à l’intéressé dans ses plaidoiries en première instance … a donc conservé une parfaite modération dans le propos ».

[Page 12]

Au vu de ces différentes motivations, il est parfaitement artificiel de soutenir, comme le font Robert Faurisson et son conseil, qu’il n’a jamais été reconnu par la justice française que les qualificatifs qu’il poursuit en la présente espèce lui ont été appliqués à tort ; que, bien au contraire, toutes ces décisions n’ont de cesse que de stigmatiser, en des termes particulièrement clairs, les manquements et les abus caractérisant ses méthodes et de valider, partant, le jugement porté par les différentes personnes qu’il a cru devoir poursuivre de ce fait et les qualificatifs, identiques à ceux ici incriminés, qu’ils ont employés à son encontre ; que c’est à tort, enfin, qu’il prétend que l’arrêt précité du 26 avril 1983 aurait porté un coup fatal à ses contradicteurs et entériné le bien-fondé desdites méthodes ; que si la cour d’appel, de fait, a écrit dans un premier temps, « que les accusations de légèreté formulées contre lui manquent de pertinence et ne sont pas suffisamment établies… (qu’) il n’est pas davantage permis d’affirmer, eu égard à la nature des études auxquels il s’est livré, qu’il a écarté les témoignages par légèreté ou négligence, ou délibérément choisi de les ignorer ; qu’en outre, personne ne peut en l’état le convaincre de mensonge lorsqu’il énumère les multiples documents qu’il affirme avoir étudiés et les organismes auprès desquels il aurait enquêté pendant plus de quatorze ans », il convient à l’évidence de relativiser la portée de ces considérations, dans la mesure où, d’une part, à supposer même qu’elles doivent être interprétées comme il le prétend, elles ne sauraient valoir blanc-seing définitif et ne portent que sur certains des griefs formulés à son encontre, et où, d’autre part – point que Robert Faurisson n’estime pas utile de préciser – elles sont immédiatement suivies, dans le même arrêt, ainsi qu’il l’a été rappelé ci-avant, d’une analyse qui conclut, en des termes sans appel, à l’absence de caractère scientifique de ses travaux et pointe ses abus méthodologiques, analyse qui conduit la cour, comme le tribunal l’avait fait, à le débouter.

Dans ces conditions, il convient de considérer que l’offre de preuve d’Ariane Chemin remplit les conditions posées par l’article 55 de la loi du 29 juillet 1881 et de renvoyer, partant, l’intéressée des fins de la poursuite.

 –   sur l’extension du bénéfice de l’offre de preuve à Teresa Cremisi

Il est soutenu par le conseil de Teresa Cremisi que celle-ci, bien que n’ayant pas formulé d’offre de preuve à titre personnel, doit néanmoins mécaniquement bénéficier de l’exception de vérité admise au profit d’Ariane Chemin.

De fait, dès lors qu’il a été reconnu que l’auteur des propos apportait la preuve de la vérité des faits avancés par ses soins, et que, partant, sa responsabilité était exclue, il doit être admis, s’agissant au surplus d’un moyen dont l’effet est de consacrer une vérité objective, que cette exclusion de responsabilité s’étend nécessairement au directeur de publication.

Teresa Cremisi sera donc également renvoyée des fins de la poursuite.

SUR L’ACTION CIVILE

Robert Faurisson est déclaré recevable en sa constitution de partie civile mais est débouté de ses demandes eu égard à la relaxe prononcée.

[Page 13]

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PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, en premier ressort et par jugement contradictoire à l’égard de Teresa CREMISI, prévenue (article 411 du code de procédure pénale), d’Ariane CHEMIN, prévenue, et de Robert FAURISSON, partie civile :

Déclare recevable l’offre de preuve d’Ariane CHEMIN ;

Renvoie Ariane CHEMIN et Teresa CREMISI des fins de la poursuite ;

Déclare Robert FAURISSON recevable en sa constitution de partie civile ;

Le déboute de ses demandes en raison de la relaxe prononcée.

En application de l’article 1018 A du code général des impôts, a présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 127 euros dont est redevable Robert FAURISSON.

et le présent jugement ayant été signe par la présidente et la greffière.

LA GREFFIÈRE                                                                                                                   LA PRÉSIDENTE