Assemblée générale de l’association Liberté pour l’histoire
Ce compte rendu a été rédigé par Grégoire Kauffmann, secrétaire délégué; certains mots ou passages sont, de mon fait, reproduits en italique ; mon propre commentaire se lit à la fin du texte.
Pierre Nora ouvre la séance – Il rend hommage à la mémoire de notre premier président, René Rémond, décédé le 14 avril 2007. Après sa disparition, Pierre Nora a accepté d’assumer la présidence de LPH qui doit être aujourd’hui consacrée par le vote des adhérents. Il ne veut pas d’une présidence éternelle et espère que celle-ci sera renouvelée dans un an. Il insiste sur la nécessité d’être épaulé dans sa tâche par le Conseil d’administration. Il évoque brièvement les changements politiques intervenus depuis le printemps dernier et la nouvelle ère qui s’est ouverte pour LPH depuis l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République.
Françoise Chandernagor, vice-présidente : rapport juridique – À la suite du décès de René Rémond, de la démission de Pierre Kerleroux comme secrétaire général adjoint, de l’impossibilité d’Alain Decaux de se rendre à une réunion de bureau, le Conseil d’administration réuni le 6 juin 2007 à la Fondation nationale des Sciences politiques a proposé comme membres remplaçants Jean-Noël Jeanneney, Jean-Claude Casanova et Krzysztof Pomian. Le bureau a élu Pierre Nora président de LPH en remplacement de René Rémond. Mona Ozouf a souhaité être déchargée de la vice-présidence tout en restant membre du Conseil d’administration. En conséquence, le bureau propose à l’Assemblée générale de confirmer l’élection au Conseil d’administration de Jean-Noël Jeanneney, de Jean-Claude Casanova et de Krystof Pomian et de reconduire les membres suivants : Jean-Pierre Azéma, Jean-Jacques Becker, Catherine Brice, Françoise Chandernagor (vice-présidente), Christian Delporte (trésorier), Valérie Hannin, Pierre Nora (président), Mona Ozouf, Hubert Tison (secrétaire général), Maurice Vaïsse, Michel Winock.
Le renouvellement du Conseil d’administration est mis aux voix de l’Assemblée générale. Il est approuvé à l’unanimité.
Pierre Nora, président : rapport moral – Françoise Chandernagor, Michel Winock et Pierre Nora ont été reçus par le président de l’Assemblée nationale Bernard Accoyer, lequel, à titre personnel, s’est montré désireux de soutenir les initiatives de LPH, notamment sur la question de l’Arménie. Bernard Accoyer leur a conseillé de solliciter différentes personnalités à Matignon, à l’Élysée, au ministère de la Culture. Pierre Nora et Françoise Chandernagor ont été reçus le 2 octobre par le ministre de l’Education nationale, Xavier Darcos, pour le mettre au courant de nos initiatives et lui demander si l’application de la circulaire parue au Bulletin officiel du 30 août 2007 et intitulée 22 octobre : commémoration du souvenir de Guy Môquet et de ses 26 compagnons fusillés impliquait obligation et sanction. M. Darcos s’est montré très ouvert. À la question de savoir si la circulaire avait un caractère contraignant, M. Darcos a répondu qu’il avait réuni les recteurs d’académies pour leur donner des conseils de souplesse : les professeurs garderont leur liberté de pédagogie. Lors de cette entretien, M. Darcos a confirmé que Nicolas Sarkozy se rendrait sans doute au lycée Carnot le 22 octobre 2007 afin d’y lire la lettre de Guy Môquet.
Françoise Chandernagor, vice-présidente – Les propositions de lois mémorielles se multiplient et sont déposées sur le bureau de l’Assemblée nationale. Il existe déjà une proposition de loi sur le «génocide» vendéen. D’autres suivront immanquablement sur le massacre des Cathares, la Saint-Barthélemy, etc. Ces propositions de loi dessinent une tendance typiquement franco-française. Il en va tout autrement au niveau européen, où le conseil des ministres européens vote les lois à l’unanimité. Ainsi, une décision-cadre « concernant la lutte contre le racisme et la xénophobie », proposée en 2001 par le gouvernement français, a été adoptée par le Conseil des vingt-cinq ministres de la Justice le 20 avril dernier, à l’unanimité. Les Etats membres doivent, sous peine de sanctions de la Commission, la transcrire dans leur droit interne avant deux ans.
Cette décision-cadre va plus loin que la législation française existante : 1°) Elle étend les sanctions pénales du type loi Gayssot (ici, jusqu’à trois ans d’emprisonnement) à la contestation de tous les génocides et crimes contre l’humanité quels qu’ils soient ; 2°) En se référant aux statuts de la Cour pénale internationale, elle s’appuie sur une définition des génocide et « crime contre l’humanité » plus large que celle de notre code pénal ; 3°) Elle crée, outre le délit de «négation», un délit de « banalisation » que le droit français ignorait jusqu’à présent. Elle crée aussi un délit de « complicité de banalisation » ; 4°) Les comportements délictueux de « négation » ou de «banalisation» ne sont plus sanctionnés seulement dans les cas de génocides ou de crimes contre l’humanité, mais aussi – ce qui est nouveau – dans les cas de crimes de guerre ; 5°) En revanche, la « négation » ou la « banalisation » de crimes contre l’humanité pour des raisons religieuses ne seront sanctionnées que si la communauté religieuse opprimée s’identifie à une race ou une ethnie particulière ; 6°) Lorsque le génocide, le crime contre l’humanité ou le crime de guerre ont été commis par un régime totalitaire (à l’exception des crimes nazis, visés dans le texte par une disposition relative au Tribunal de Nuremberg), il reste, pour l’instant, permis de les nier, de les banaliser ou même d’en faire l’apologie. Malgré la demande des pays baltes, le Conseil des ministres européens a jugé impossible de rattacher les crimes du totalitarisme au racisme, unique objet, en principe, de la décision. Le Conseil se borne donc à renvoyer à la Commission le soin d’organiser, quand il lui plaira, une «audition publique» sur cette catégorie de crimes dans l’espoir de déboucher un jour sur des « réparations appropriées ». En clair, la « gayssotisation » générale continue d’épargner ceux qui nient ou banalisent les crimes du communisme, Katyn, la dékoulakisation, etc. En France, l’adoption de cette décision-cadre est passée inaperçue. Nous en avons été alertés par un historien italien. Pour l’heure, seuls les Anglais ont réagi en protestant contre une décision qui aboutit à une limitation inacceptable de la liberté d’expression. Cette affaire exprime un état d’esprit global ; elle montre que les historiens doivent s’organiser à l’échelle européenne pour défendre leur liberté d’expression.
Hubert Tison, secrétaire général : rapport financier – Les recettes sont celles des cotisations. Les dépenses en 2006 sont celles 1°) de la domiciliation de l’association, 23-25 rue Jean-Jacques Rousseau, 75001 Paris : 138,58 euros du 12/9/2006 au 31/12/2006 2°) de la gestion du compte Bred : 8 euros par mois 3°) de l’assurance MAIF ; 4°) des envois de convocations pour l’assemblée générale de 2006. Les dépenses en 2007 sont celles : 1°) de la domiciliation rue Jean-Jacques Rousseau : 55,26 euros par trimestre ; 2°) de la gestion du compte Bred : 8 euros par mois ; 3°) de la cotisation MAIF ; 4°) des enveloppes et timbres pour les convocations des adhérents (1er envoi) ; 2e envoi « bon pour le pouvoir » par la poste (destinés aux adhérents qui n’ont pas de courriel). Bilan au 26/9/2007 : 5.391,42 euros Le nombre d’adhérents était de 217. À la veille de l’assemblée générale 2007, 137 adhérents avaient renouvelé leur cotisation.
Pierre Nora, président – Il constate que les ressources financières sont insuffisantes. Il lui paraît donc impératif de mobiliser des mécènes, de multiplier les adhésions de soutien. Il estime qu’une somme 20 à 30 000 euros permettrait à l’association des initiatives que sa pauvreté actuelle lui interdit. Par ailleurs, les adhérents de LPH sont trop peu nombreux. Un effort doit être entrepris en direction des professeurs d’histoire et de géographie du secondaire. Il importe d’autre part d’élargir le cercle de LPH en obtenant le concours de philosophes, d’avocats, de magistrats. Les juristes doivent se mobiliser car tous ces textes de lois mémorielles avancent masqués. Il est temps que LPH engage une ouverture vers l’étranger : Italie, Angleterre, Belgique où il existe une association du même type que la nôtre. Coordonnons notre lutte à l’échelle internationale : il y a là un cadre d’action que nous connaissons mal. Il est essentiel de faire comprendre au public que LPH ne mène pas un combat corporatiste mais que les historiens se trouvent aujourd’hui, par la force des choses, au premier rang d’un combat pour la liberté de l’esprit qui intéresse tous les citoyens.
Le rapport moral et le rapport financier sont mis aux voix de l’Assemblée générale. Ils sont approuvés à l’unanimité.
Pierre Nora, président – Il présente Grégoire Kauffmann, secrétaire délégué de LPH, auteur d’une récente thèse sur Edouard Drumont et éditeur à CNRS Éditions. Grégoire Kauffmann est chargé d’assurer la coordination entre les adhérents et d’animer le site Internet de l’association, qui sera mis en ligne à la fin du mois d’octobre. Pierre Nora annonce la publication pour le début de l’année 2008 d’un court texte d’intervention sur LPH à CNRS Éditions. L’opinion a évolué ; elle a compris qu’il était impossible de revenir sur la loi Gayssot. Sur cette question, gardons-nous d’adopter une attitude défensive ; nous devons être offensifs sur le plan intellectuel. LPH doit devenir un laboratoire de réflexion. Il importe de convaincre individuellement les historiens gênés par la loi Gayssot.
Françoise Chandernagor, vice-présidente – À la question de Pierre Bonet sur l’attitude de LPH face au « floutage » du visage de Mahomet dans les manuels scolaires Belin (classes de 5e), Françoise Chandernagor répond que nous pourrions rendre visite aux éditeurs de manuels scolaires pour leur dire : ne vous censurez pas. Elle revient sur la question de la loi Gayssot, impossible à abroger car elle s’inscrit aujourd’hui pleinement dans la législation européenne, d’où la nécessité de sortir le débat sur les lois mémorielles du cadre franco-français.
Pierre Nora, président – Il souhaite que l’association soit aussi présente que possible dans la presse et les médias pour sensibiliser l’opinion et définir une attitude qui n’est pas toujours facile à faire comprendre à une opinion sensible aux souffrances légitimes des victimes. Il souhaite aussi qu’entre les Assemblées générales, des réunions plus intimes puissent être organisées pour discuter des actions à entreprendre. Il souhaite que ces réunions puissent faire de LPH un laboratoire de réflexion.
LISTE DES PRÉSENTS : Aldebert Jacques, Allain Jean-Claude, Azéma Jean-Pierre, Barthélemy Dominique, Becker Jean-Jacques, Benkorich Nora, Bilger Philippe, Blandin Claire, Cadet Nicolas, Brice Catherine, Bonet Pierre, Chandernagor Françoise, Briquel Chatonnet Françoise, Chassagne Françoise, Colosimo Jean-François, Crepin Thierry, Damaye Joëlle, Delaunay Jean-Marc, Eveno Philippe, Fichten Louis, Foucrier Annick, Hannin Valérie, Jeanneney Jean-Noël, Joly Laurent, Kazancigil Ali, Kauffmann Grégoire, Kerleroux Pierre, Le Bail Karine, Le Goff Jean-Pierre, Lemaître Nicole, Maillard Christophe, Maillé-Virole Catherine, Montenay Yves, Nantet Bernard et son fils, Nora Pierre, Ozouf Mona, Pervillé Guy, Peyrot Jean, Pomian Krzysztof, Puiseux Hélène, Renonciat Annie, Senard Catherine, Senneville Gérard de, Thibaud Paul, Till Eric, Tison Hubert, Vaïsse Maurice, Vergez Chaignon Bénédicte, Winock Michel.
LISTE DES POUVOIRS : Agulhon Maurice, Allies Paul, Andrivet Patrick, Benassar Bartholomé, Bianco Lucien, Bimbenet Jerôme, Boulle Pierre, Champet Chantal, Chandernagor André, Chaouky Hamida, Cérino Christophe, Cieutat Bernard, Cieutat Marie-Antoinette, Chartier Marie-Thérèse, Chrétien Jean-Pierre, Cochet François, Coudry Marianne, Croubois Claude, Daix Pierre, Descamps Cyril, Duhem Jacqueline, Duval Noël, Fauchois Yann , Fray Jean Luc, Gaillard Michèle, Galster Ingrid, Gayrard Pierre Jean , Grenouilleau Mauricette, Guénaire Michel, de Guillenchmidt Jacqueline, Koessler Thierry, Lalouette Jacqueline, Lecuir Jean, Lecat Jean-Philippe, Marconis Robert, Martin Michèle, Medard Madeleine, Michaux Madeleine, Michaux Marie-Anne, Monnet Sylvie, Neveu Valérie, Oudin Bernard Pagnon Bruno, Pagnon-Pila Claire, Pecha Soulez Michel, Perriaux Bernard, Petot Françoise, Piachet Sylvie, Poignant Nathalie, Roman Alain, Rowley Antony, Roudinesco Elizabeth, Savornin Marie-Noël, Stora Frank, Sussel Philippe, Thomann Bernard, Verclytte Thomas, Verger Jacques, Veyne Paul, Vincent Catherine, Vivant Carole, Weber Jacques.
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COMMENTAIRE : L’officine qui se pare du nom de Liberté pour l’histoire vient de jeter le masque mais en petit comité. Elle affecte de combattre TOUTES les lois mémorielles, mais, en réalité, rien ne lui est plus cher que la loi Fabius-Gayssot, laquelle permet d’envoyer en prison quiconque doute de la sacro-sainte « Shoah » ou la conteste. J’ai toujours dit que René Rémond, ancien président de cette association, entendait faire le jeu de ceux qui voulaient et qui veulent encore, à tout prix, conserver au seul profit de la « Shoah » une loi mémorielle. Pour ces personnes, il faut empêcher de possibles rivaux, tels les Arméniens, les Noirs, les Pieds-noirs, les anciens colonisés, les Vendéens et d’autres, d’obtenir à leur profit le vote de lois identiques. L’abominable réponse de feu R. Rémond à Georges Theil, qui venait d’être lourdement condamné à une peine de prison ferme et à de graves sanctions financières sur le fondement de cette loi, prouvait déjà, s’il en était besoin, la détermination de nos bons apôtres (de la liberté de recherche !) à sauvegarder en fait un privilège : celui d’une loi spécifique au seul bénéfice de la « Shoah ». On voit ici que, pour la vice-présidente de l’association, il est « impossible de revenir sur la loi Gayssot » ; cette loi est «impossible à abroger». Mieux : il faut, dans la défense de cette loi, se garder «d’adopter une attitude défensive» ; « nous devons être offensifs sur le plan intellectuel » et il faut « convaincre individuellement les historiens gênés par la loi Gayssot ».Ce qui est ici préconisé, c’est de prendre, en public et de manière «offensive», la défense de la loi Fabius-Gayssot qui permet d’envoyer les sceptiques en prison pour trois ans cependant qu’en privé, au sein de la corporation des historiens, cette défense de la crapuleuse loi socialo-communiste se fera, de préférence, en cherchant à « convaincre individuellement » ceux qui sont « gênés » par cette loi. Ces propos, Françoise Chandernagor les tient à l’heure où elle sait qu’une décision-cadre européenne, fondée sur une décision-cadre française mais dépassant cette dernière, pourrait nettement aggraver la loi Fabius-Gayssot tout en préservant le droit, en ce qui concerne les « crimes de guerre » et les «crimes contre l’humanité» imputables aux mouvements et régimes communistes, «de les nier, de les banaliser ou même d’en faire l’apologie » ! Au passage, on aura aussi noté la suggestion faite par le président de l’Assemblée nationale, Bernard Accoyer, d’aller solliciter telle ou telle personnalité politique pour essayer d’entraver le vote d’une loi mémorielle « arménienne ». On y ajoutera l’idée, émise par F. Chandernagor, d’aller rendre visite aux éditeurs de manuels scolaires pour leur dire : « Ne vous censurez pas ! » ; il s’agirait de ne plus censurer (ici, par floutage) ce qui peut offenser les musulmans. Non seulement il se confirme donc qu’il est interdit de pénétrer avec l’arme du doute et de la réflexion dans le domaine d’une « chasse gardée », celui de la « Shoah », mais nul n’aura le droit, en particulier les musulmans, à un privilège identique : seule la préservation de la « Shoah » est sacrée sous peine de poursuites soit pour blasphème, soit pour outrage ! Et F. Chandernagor se permet, ici, de dénoncer « ceux qui s’avancent masqués » !
La réunion, à la fois publique et confidentielle, dont on vient de lire ici le compte rendu, s’est tenue à la Sorbonne, où un amphithéâtre avait été mis gracieusement à la disposition de P. Nora et F. Chandernagor, respectivement président et vice-présidente de l’association qui arbore le nom de Liberté pour l’histoire, association à laquelle on peut s’inscrire en s’adressant à son siège, 23-25, rue Jean-Jacques Rousseau, 75001 PARIS.
6 octobre 2007