Lettre au président de la chambre criminelle de la Cour de cassation dans le cadre de mon affaire contre Le Monde et sa journaliste Ariane Chemin
à Monsieur Didier Guérin,
Président de la chambre criminelle de la Cour de cassation
5, Quai de l’Horloge
TSA 70660 – 75055 PARIS CEDEX 01
18 avril 2018
Monsieur le Président,
Vous voudrez bien, je vous prie, trouver ci-joint le texte d’un mémoire personnel. Ce dernier a été rédigé à mon intention par mon avocat, Me Damien Viguier. J’en approuve le contenu et je l’ai signé de mon nom à la condition expresse de pouvoir ajouter à son texte, qui est de caractère et d’expression purement juridiques, une lettre qui vous soit adressée et qui sera – pardonnez-moi – d’un style simple et direct.
Permettez-moi d’abord de me présenter. Je suis né au Royaume-Uni d’un père français et d’une mère britannique, plus exactement écossaise. Personnellement, je me trouve être d’abord un citoyen britannique, puis un citoyen français. J’aurai bientôt 90 ans. Au terme d’une existence principalement consacrée, sur le plan professionnel, à la recherche littéraire et historique, je me vois aujourd’hui présenté par une cour d’appel française comme « un menteur professionnel », « un falsificateur » et « un faussaire de l’histoire » parce que, sur un point de plus en plus controversé de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, il m’a fallu, en conscience, donner raison aux révisionnistes : en 1945-1946, le Tribunal militaire (prétendument) international (TMI) de Nuremberg en a menti : contrairement à ce qu’il statue il n’a jamais existé d’ordre ou de programme d’extermination des juifs d’Europe ni de chambres à gaz homicides dans les camps allemands et les chiffres de plusieurs millions de victimes juives sont une invention qui remonte à une certaine propagande qui a pris son envol au XIXe siècle ! Il n’y a eu ni complot ni conjuration pour accréditer cet ensemble de mensonges mais une acceptation lente et spontanée de slogans qui se multiplient aisément en temps de guerre ou de crise et dans une incroyable cacophonie. Dans la Pravda (la Vérité !) du 2 février 1945, les Soviétiques apprenaient qu’à Auschwitz les Allemands exterminaient leurs victimes à l’électricité : les cadavres tombant sur un tapis roulant étaient transportés dans les hauteurs jusqu’à un haut-fourneau pour y être déversés et brûlés. Pour Élie Wiesel, figure tutélaire de « l’Holocauste », les juifs, à Auschwitz, étaient déversés vivants dans des fournaises en plein air ; il n’admettait l’existence des « chambres à gaz » ni en réalité, ni en « imagination » (sic). Pour la propagande américaine, au contraire, à Auschwitz on utilisait des chambres à gaz installées dans des bâtiments de crémation et cela en dépit du fait que le Zyklon B, puissant insecticide et pesticide inventé dans les années 1920, était à base d’acide cyanhydrique (HCN), un poison connu pour être hautement inflammable, hautement explosif, hautement dangereux pour l’homme et pour l’environnement.
Je me vois parfois reprocher de n’être pas, à proprement parler, un historien. Il est vrai que je ne suis qu’un agrégé des lettres qui, au début de sa carrière, a enseigné le français, le latin et le grec mais, par la suite, j’ai obtenu le doctorat ès lettres et sciences humaines et ces sciences-là comportent l’histoire. En qualité de professeur d’université j’ai fini par me consacrer expressément à l’enseignement de la « Critique de textes et documents (littérature, histoire, médias) ». Mes publications forment à ce jour un ensemble important et, à elle seule, l’une d’elles, intitulée Écrits révisionnistes, ne compte pas moins de huit tomes. Un éminent chimiste allemand, devenu révisionniste, est allé, en 2001, jusqu’à rendre hommage au pionnier de la recherche matérielle et de la recherche médico-légale en matière d’étude de la scène de crime et de l’arme du crime de « l’Holocauste » : un Français, professeur de littérature française. Intitulé « Faurisson pulls the trigger » (Faurisson appuie sur la détente), l’hommage commence en ces termes : « It took a professor of French literature to inform the world that determining whether mass murder took place at Auschwitz is a matter for forensic evidence » (Il a fallu un professeur de littérature française pour informer le monde de ce que la détermination du point de savoir s’il y a eu un meurtre de masse à Auschwitz est affaire de criminologie).
À l’occasion d’un flot de procès, des associations ou des individus ont cru devoir me traiter de faussaire. Tel a été le cas, retentissant, de Robert Badinter. Il a osé dire que, du temps qu’il était encore avocat, il m’avait fait condamner « pour être un faussaire de l’histoire ». Or, un jugement de la XVIIe chambre correctionnelle de Paris a conclu qu’il avait « échoué en son offre de preuve [de ce qu’il avait dit vrai] » et n’a pu lui accorder la relaxe qu’en vertu du bénéfice de la bonne foi. Jamais de ma vie de chercheur et de publicateur il ne m’a fallu recourir si peu que ce fût au mensonge, à la falsification ou au faux. Mes découvertes ont été innombrables, comme celle, par exemple, le 19 mars 1976, des plans des cinq bâtiments de crémation, à Auschwitz, censés avoir contenu des chambres à gaz homicides, des plans jusqu’alors tenus cachés par crainte de révéler le pot aux roses.
C’est en désespoir de cause et parce qu’ils se rendent compte de leur incapacité à nous fournir des preuves à l’appui de leurs accusations que mes adversaires en sont aujourd’hui réduits à de grotesques expédients comme celui qui consiste à prétendre ceci : la loi Gayssot (du nom d’un député communiste !) interdit de contester, en fait, la réalité du génocide des juifs et des chambres à gaz nazies ; or R. Faurisson s’autorise cette contestation ; donc il n’est pas seulement un délinquant, mais… un menteur !
Que vaut ce paralogisme, cette construction de l’esprit, ce janotisme ?
L’argent ni la renommée ne m’intéressent. Justesse et justice m’intéressent. Je recherche passionnément sinon la vérité, mot vague et prétentieux, du moins l’exactitude. À cause du résultat de mes recherches, j’ai eu à subir publiquement dix agressions physiques : deux à Vichy, deux à Lyon, quatre à Paris (notamment au Palais de justice où je comparaissais et à la Sorbonne où j’avais enseigné) et deux à Stockholm. Pas une fois mes agresseurs n’ont été inquiétés. Dans un cas les séquelles physiques en sont encore dans mes vieux jours à provoquer des douleurs physiques intolérables. La vie de ma femme et de mes enfants s’est abominablement ressentie de cette atmosphère de chasse à l’homme.
D’où vient mon obstination à poursuivre un tel combat jusqu’à mon dernier souffle ? Peut-être de mon enfance et de ma formation d’aîné d’une famille de sept enfants. Un soir de 1942, à l’âge de treize ans, aux côtés de mon père, j’ai entendu Pierre Laval déclarer qu’il souhaitait la victoire de l’Allemagne car, autrement, disait-il, nous verrions la victoire du bolchevisme en Europe. Mon indignation a été telle que, le lendemain, à « l’École de Provence » de Marseille, tenue par des pères jésuites, j’ai gravé au couteau sur l’abattant de mon pupitre noir : « Mort à Laval ». Je ne reviendrai pas ici sur les suites de l’affaire que j’ai par ailleurs narrée mais ce qui, à l’époque, m’a tant frappé et que je n’ai jusqu’ici jamais cru devoir rapporter, c’est l’état de déréliction où je me suis alors retrouvé : pas un camarade de classe, pas un maître n’a voulu m’apporter son soutien, y compris le jeune François-Xavier de Larminat. Seul m’est venu en aide, sans un mot toutefois, le menuisier de l’école qui a bien voulu raboter et repeindre l’abattant de pupitre. Le Père préfet m’avait humilié devant mes petits camarades : « Oh ! Vous, Faurisson, avec vos Anglais qui courent dans le désert comme des lapins ! » Montgomery retraitait alors devant Rommel à Tobrouk et à Benghazi. J’étais en faveur des Alliés, Staline y compris, et vivement désireux de voir se multiplier le plus de bombardements possibles des populations civiles par l’aviation anglo-américaine. Mais, par la suite, le 8 mai 1945, installé alors à Paris, j’ai entendu sonner à toute volée les cloches de Saint-Sulpice, de la Chapelle des Carmes et d’ailleurs. Je me suis senti envahi de compassion pour le vaincu. J’ai pensé qu’il nous fallait tendre la main à celui qui, à terre et ensanglanté, n’était plus un ennemi, mais un être humain trahi par le sort des armes. J’ai pensé que nous devions, ensemble, essayer de comprendre pourquoi au juste je l’avais tant haï et pourquoi, de son côté, il m’avait peut-être haï à proportion. Il nous fallait revoir et, si possible, évaluer à sa juste valeur l’atroce boucherie de la guerre. Au Collège Stanislas, une stèle élevée à la mémoire d’un « gentilhomme », le « chevalier » Bayard, portait la devise « Sans peur et sans reproche ». Mon père m’avait mis en garde : « Attention ! Ce n’est pas la vérité. Ce n’est qu’une devise, un idéal, un rêve. Une rêverie d’esprit militaire. Un jeune homme n’a pas à devenir un “gentilhomme” ; c’est de la prétention. Qu’il se contente de chercher à devenir un gentleman ! »
Les horreurs de tant d’exactions et de crimes à l’époque de la Libération m’ont dégoûté des exploits des Libéra-tueurs, qu’il s’agisse de l’exécution de Mademoiselle Armagnac dans sa robe de jeune mariée à Exideuil-sur-Vienne (Charente limousine) ou, au Palais de Justice de Paris (oui, à la XVIIe chambre !), de la condamnation à mort de Pierre Gallet par un tribunal de juges-accusateurs. Les guerres et les révolutions ne m’inspirent qu’un sentiment d’effroi et de répugnance.
Je paye aujourd’hui bien cher d’avoir voulu et de vouloir encore à un âge avancé me comporter en gentleman. Quant à la haine, qu’elle soit des juifs ou d’autres, elle n’est qu’une perte de temps et rend bête. La Seconde Guerre mondiale est finie, n’est-ce pas ? Depuis plus de soixante-douze ans ! Alors finissons-en le plus tôt possible avec cette aberrante propagande de guerre et ses humiliants mensonges ! Tel est mon souhait le plus ardent. Les hommes et les femmes qui ont en charge l’administration de la justice devraient être les premiers à refuser de se compromettre avec toutes les formes de la haine et du mensonge.
J’ai une suggestion à leur faire. Qu’ils méditent sur le cas de leur confrère Charles Gray, juge à la High Court de Londres, qui, en avril 2000, a débouté le semi-révisionniste David Irving de sa plainte contre Deborah Lipstadt ! Dans un accès de franchise, il en est venu à nous faire cette confidence : « I have to confess that, in common I suspect with most other people, I had supposed that the evidence of mass extermination of Jews in the gas chambers at Auschwitz was compelling. I have, however, set aside this preconception when assessing the evidence adduced by the parties in these proceedings. » (Je dois avouer que, comme je pense, la plupart des gens, j’avais supposé que les preuves d’une extermination massive de juifs dans les chambres à gaz d’Auschwitz étaient imparables. Pourtant, j’ai écarté cette idée préconçue quand j’ai eu pesé le pour et le contre des preuves que les parties ont apportées aux débats).
Recevez, je vous prie, Monsieur le Président, mes salutations distinguées.
Robert Faurisson