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Une loi de circonstance de 1990 ne peut effacer la teneur d’un arrêt solidement motivé de 1983

En 1978/1979, notamment dans le journal Le Monde, un universitaire a soutenu que les prétendues chambres à gaz hitlériennes n’avaient jamais existé.

Dix organisations, à commencer par la LICRA, ont porté plainte contre ledit universitaire pour « dommage à autrui par falsification de l’histoire ».

Contraintes de formuler leur plainte en termes plus juridiques et plus précis, ces organisations en sont venues à soutenir que cet universitaire s’était rendu coupable de quatre fautes : légèreté, négligence, ignorance délibérée et mensonge, chaque faute ayant été commise en un domaine spécifique.

Or, par un arrêt en date du 26 avril 1983, la première chambre civile de la cour d’appel de Paris (section A) a répondu, point par point, que l’universitaire en question n’avait commis aucune de ces quatre fautes. Elle a ajouté qu’en conséquence « la valeur des conclusions défendues par [cet universitaire sur ce sujet] relève donc de la seule appréciation des experts, des historiens et du public ». Cette décision signifie que, vu le caractère sérieux des recherches de l’intéressé sur les chambres à gaz hitlériennes, tout citoyen français a le droit de prendre à son compte les conclusions de cet universitaire sur l’inexistence de ces armes de destruction massive ou, à plus forte raison, d’en discuter librement.

Dans une seconde partie de cet arrêt, les magistrats ont définitivement condamné l’universitaire mais pour d’autres motifs, vagues et mal étayés.

Les associations se sont fortement émues de ce que la cour avait « marché » (sic) quant à la question des chambres à gaz hitlériennes et « ne l’avait en somme condamné que pour avoir résumé ses thèses en slogans ». Un mouvement s’est alors dessiné pour exiger le vote d’une loi qui interdise la contestation de l’existence des « crimes contre l’humanité » tels que définis, établis et condamnés en 1945-1946 par un tribunal d’exception qui s’était qualifié de « Tribunal militaire international ». Le Statut qu’il s’était forgé annonçait en son article 19 : « Le Tribunal ne sera pas lié par les règles techniques relatives à l’administration des preuves […] » ; en son article 21, il ajoutait avec la même audace : « Le Tribunal n’exigera pas que soit rapportée la preuve de faits de notoriété publique mais les tiendra pour acquis ». Il s’agissait donc, selon ses propres dires, d’un tribunal où point n’était besoin de prouver pour condamner.

Dans les années 1983 et suivantes ledit mouvement s’est poursuivi et il a notamment exploité un scandale faussement antisémite ­avec « l’affaire de Carpentras ». C’est ainsi que, le 13 juillet 1990, le Parlement a pu adopter à la majorité des votants, la « loi Gayssot » (du nom d’un député communiste).

Une telle loi, si déplorable soit-elle, n’efface pas pour autant le fait que, le 26 avril 1983, une haute instance judiciaire a été conduite à rendre hommage, en pleine connaissance de cause, au travail de cet universitaire sur les prétendues chambres à gaz hitlériennes.

18 mars 2018