Un chat provoque l’explosion d’une chambre à gaz destinée à la mise à mort d’animaux (Canada, 1936)
Le gaz ici employé était explosif mais sa nature n’était pas spécifiée. Il s’agissait fort probablement d’acide cyanhydrique ou cyanure d’hydrogène (HCN), composant explosif du Zyklon B (inventé dans les années 1920). L’occasion ici se présente de rappeler le caractère explosif d’un tel gaz employé parfois pour tuer des nuisibles ou pour exécuter un condamné à mort. Dans le passé, j’ai diffusé une photo, très connue, de Life sur l’explosion d’une villa américaine traitée au HCN.
J’ai aussi parlé du désastre provoqué, en Croatie, par une tentative de désinfection d’une église. J’ai rappelé que même la firme Degesch, dans une section de son mode d’emploi intitulée Explosionsgefahr, signalait le danger d’explosion du Zyklon B. Encore tout récemment j’ai découvert un document français du Ministère de la Santé où le HCN était décrit comme hautement inflammable, hautement explosif, hautement dangereux pour le personnel et pour le voisinage. Il aurait donc fallu avoir perdu l’esprit pour aller installer, comme on prétend que les Allemands l’auraient fait à Auschwitz-I, une chambre à gaz (Gaskammer) d’exécution sous le même toit qu’un bâtiment de crémation. Et cela d’autant plus qu’entre la salle de gazage et la salle de crémation qui se visitent encore aujourd’hui il n’y avait pas même de porte de séparation. En outre, tous ces prétendus gazages quotidiens de centaines d’individus auraient eu lieu à quelques mètres d’une infirmerie hospitalière réservée aux SS (SS-Revier). À ce compte, chaque jour, au moment de l’évacuation du gaz, cette infirmerie aurait été inondée par des flots d’un gaz hautement toxique. Le 19 mars 1976 j’avais découvert dans les archives du Musée d’État d’Auschwitz qu’en réalité la pièce baptisée après la guerre du nom de chambre à gaz avait été, pendant la guerre, d’abord une Leichenhalle (halle à cadavres ou dépositoire), puis, après transformation des lieux, un Luftschutzbunker für SS Revier, un abri anti-aérien pour ladite infirmerie.
Peu importe à partir de quelle quantité ou densité un gaz peut exploser. S’il est qualifié d’explosif, cela veut dire qu’à tout instant cette quantité ou cette densité peuvent être atteintes et, donc, provoquer une explosion. Par conséquent, tout feu, fût-ce celui d’une cigarette, doit être prohibé sur les lieux. Et c’est bien ce que spécifient les règles d’usage du Zyklon B. Or, dans le texte signé par le malheureux Rudolf Höss, il est dit que les juifs, membres du Sonderkommando ou « équipe spéciale », chargés d’entrer dans la chambre à gaz pour la vider de ses cadavres se livraient à leur besogne « en mangeant et en fumant ». Admirons là un excellent moyen pour se gazer soi-même et pour provoquer une explosion. Toujours d’après Höss, quand ces gens n’entendaient plus les cris des victimes, ils mettaient en marche l’appareil de ventilation et entraient aussitôt (sofort) dans la chambre à gaz, en mangeant, en fumant et dans la plus grande indifférence ! Autrement dit, ils ne portaient pas même de masques à gaz. Il y a là une impossibilité physique radicale. Il est vrai que Höss avait été battu comme plâtre et qu’on lui avait ensuite administré la torture la plus efficace : grâce, par exemple, à la pointe d’un stick de commandement portée sur ses paupières on l’empêchait de s’endormir pendant plus de deux jours et deux nuits. En tel cas, n’importe qui finira par signer n’importe quel texte contenant n’importe quelle confession dactylographiée (Rupert Butler, Legions of Death, Hamlyn, Londres 1983). Rappelons enfin la conversation de Höss avec Moritz von Schirmeister : « Assurément, j’ai signé que j’avais tué 2 millions et demi de juifs. Mais j’aurais tout aussi bien signé qu’il y en avait eu 5 millions. Il y a précisément des méthodes pour obtenir n’importe quel aveu – que ce soit vrai ou non » ; voyez la note 11 à Comment les Britanniques ont obtenu les aveux de Rudolf Höss, commandant d’Auschwitz (7 mai 1987).
N.B. : Voulant faire tenir mon commentaire en une page, je me suis abstenu de mentionner un exemple supplémentaire de danger d’explosion du HCN. Ce danger m’a été révélé par le personnel du pénitencier de Baltimore lors de ma visite en 1979 de sa chambre à gaz (voyez Chambre à gaz du pénitencier de Baltimore, Maryland (USA), 11 février 1980) : si le condamné à mort est ligoté sur son siège avec tant de fermeté, c’est afin d’éviter que, se débattant dans les affres de la mort, il ne provoque ainsi un phénomène d’électricité statique risquant d’entraîner une explosion.
8 mars 2016