Les fusillés du Mont-Valérien : environ 1.000 et non 4.500
En première page du Monde, daté des 21-22 septembre 2003, Alexandre Garcia signe un article intitulé « Une cloche monumentale pour honorer les martyrs du Mont-Valérien ». Il écrit :
De 1941 à 1944, plus de 1 000 résistants et otages ont été fusillés par les nazis dans la clairière du Mont-Valérien, au-dessus de Suresnes (Hauts-de-Seine), à l’ouest de Paris. Sur cette colline où le général de Gaulle fit ériger en 1960 un Mémorial de la France combattante, rien, aucune plaque, stèle ou monument, n’a jamais rappelé aux visiteurs les noms de ces martyrs morts pour la France. « Ces héros étaient devenus un long cortège d’ombres anonymes, comme autant de soldats inconnus de la Résistance française », s’est ému Robert Badinter, sénateur PS des Hauts-de-Seine, à l’initiative d’une proposition de loi déposée en 1997 pour mettre fin à « cette extraordinaire et injustifiable omission ».
Il précise que sur le nouveau monument figurent, par ordre chronologique et alphabétique, les noms de 1 006 fusillés et qu’une place vide symbolise les fusillés demeurés inconnus (probablement une dizaine).
À aucun moment il ne rappelle que l’ancien monument portait le chiffre de 4 500 victimes. On avait multiplié par plus de quatre le nombre réel des fusillés ! L’absence de noms s’expliquait donc le plus simplement du monde : du temps du général de Gaulle on s’était, sur le sujet, rendu coupable d’une si grossière exagération qu’on aurait été bien en peine d’inscrire les noms de tant de fusillés fictifs.
Ce 18 septembre au matin, sur les ondes de France-Inter, Robert Badinter, d’un ton fébrile et vengeur, a dénoncé avec insistance le fait qu’on avait pendant plus de cinquante ans caché les noms des fusillés. Il a jugé le procédé outrageant et inexplicable. Ni lui, ni le responsable du mémorial, ni le journaliste Stéphane Paoli qui les interrogeait avec gourmandise n’ont, bien sûr, rappelé aux auditeurs l’existence du monument de grès sur lequel les résistants avaient, en 1960, fait graver le chiffre fallacieux de « plus de 4 500 » fusillés.
La tricherie d’A. Garcia est d’autant moins pardonnable que son confrère du Monde, Laurent Greilsamer, avait, le 30 mars 1995, publié exactement à la même page, au même emplacement (« le ventre ») et dans la même typographie un article intitulé «Les fusillés fantômes du mont Valérien». Dans cet article était mentionnée l’existence de « la plaque commémorative de grès brut » indiquant le chiffre (à «corriger», disait L. Greilsamer) de 4 500 morts. La tricherie d’A. Garcia a consisté à écrire : « rien, aucune plaque, stèle ou monument, n’a jamais rappelé aux visiteurs les noms de ces martyrs morts pour la France ». Formellement, la phrase est exacte puisque, aussi bien, l’ancienne plaque n’indiquait pas les noms (et pour cause !), mais la tournure choisie par A. Garcia est telle que le lecteur est soigneusement tenu dans l’ignorance du fait qu’il y a eu dans le passé une plaque, une stèle ou un monument rendant hommage aux fusillés. Simplement cette plaque, cette stèle, ce monument portait un chiffre qu’on avait gonflé dans la pieuse intention de rendre à ces fusillés et à la Résistance tout entière un hommage particulièrement appuyé. R. Badinter, A. Garcia et leurs amis veulent nous faire croire qu’il y aurait eu « silence » et « omission » alors qu’en réalité il n’y a eu ni silence ni omission, mais lourde, maladroite et même malhonnête insistance à nous vanter ces « héros de la Résistance ».
Cette révision à la baisse du nombre des fusillés rappelle bien d’autres révisions, tout aussi tardives et auxquelles on ne s’est résolu que sous la poussée des auteurs révisionnistes. Contentons-nous de deux exemples. La plaque du Vélodrome d’hiver évoquait le souvenir de 30 000 internés juifs jusqu’au jour où ce nombre a été officiellement réduit à 8 160. Quant aux plaques d’Auschwitz, elles indiquaient, encore en 1990, le chiffre de 4 000 000 de morts ; en 1995 les nouvelles plaques remplaçaient ce chiffre par celui de 1 500 000 morts cependant que, dans les années qui ont suivi, les auteurs orthodoxes ont procédé à toute une série de dévaluations, leur dernière estimation étant, depuis l’an dernier, de 510 000 morts (Fritjof Meyer, Osteuropa, mai 2002, p. 631-641). Les révisionnistes, eux, proposent une autre estimation qu’un jour peut-être les auteurs officiels adopteront à leur tour.
En plus de l’article de L. Greilsamer et de celui d’A. Garcia, on pourra consulter 1) le communiqué de l’AFP publié dans Le Figaro du 30 mars 1995 sous le titre « Mont-Valérien : le vrai chiffre » ; 2) Robert Faurisson, Serge Klarsfeld divise par quatre le nombre des fusillés du Mont-Valérien, 30 mars 1995, Écrits révisionnistes (1974-1998), 1999, p. 1656-1657 ; 3) Georges-Paul Wagner, « Il y a donc un bon révisionnisme ! », Présent, 30 janvier 1999, p. 2 ; 4) « Mont-Valérien: le bon révisionnisme », Rivarol, 5 février 1999, p. 3.
Le Parti communiste français, qui se disait autrefois le « Parti des 75 000 fusillés » (pas moins !) explique aujourd’hui froidement que la différence entre 1006 et 4 500 « s’explique » (sic) : « Le chiffre de 4 500 correspond aux estimations de l’époque de la Libération. Il correspond aussi au total des martyrs sur l’ensemble de l’Île-de-France » (L’Humanité Hebdo, 20-21 septembre 2003, p.16).