L’aventure révisionniste

Sauf exception, un chercheur révisionniste n’est pas un intellectuel confiné dans son cabinet de travail. Même s’il aspire à vivre dans une sorte de Thébaïde, la société se chargera de l’en sortir. 
 
Pour commencer, il doit être homme de terrain et se rendre partout où l’exigent ses recherches. Et comme personne ne l’aidera dans ces recherches-là – bien au contraire –, il lui faudra apprendre à ruser avec l’adversité et à contourner cent obstacles pour parvenir à ses fins. Il sera à l’école de la vie. 
 
Il lui faut, par ailleurs, multiplier les contacts, à travers le monde, avec d’autres révisionnistes parce qu’aucun chercheur ne peut s’isoler dans son propre travail. Personnellement, le révisionnisme m’aura, comme on dit, fait voir du pays, en particulier les États-Unis, le Canada et l’Allemagne, mais aussi la Grande-Bretagne, les Pays-Bas, la Belgique, la Norvège, la Suède, l’Autriche, la Suisse, l’Espagne, l’Italie, la Pologne et quelques autres pays encore. Il n’est pas jusqu’à l’Australie ou la Nouvelle-Zélande, l’Ukraine et le Japon, la Tunisie, l’Afrique du Sud, l’Iran ou le Pérou qui ne figurent parmi les pays où se développe aujourd’hui le révisionnisme historique. C’est à l’occasion de tels contacts qu’on découvre les différences des mentalités anglo-saxonne, germanique, latine, arabe, juive, catholique, protestante, musulmane ou athée devant l’un des plus puissants tabous que l’histoire ait connus : celui de l’« Holocauste » des juifs. Le révisionnisme, qui dévoile ce tabou, agit alors comme un révélateur de ces mentalités.
 
Il révèle aussi le fond des individualités et le mécanisme de fonctionnement des institutions. J’aime à scruter le visage de l’homme, de la femme, du vieillard ou de l’adolescent qui frémit en entendant, pour la première fois de sa vie, le propos sacrilège d’un révisionniste. Chez les uns, le visage se colore et une lumière s’allume dans l’œil : leur curiosité s’éveille. Chez les autres on blêmit : chez ces derniers, celui qui se croyait tolérant se découvre intolérant et tel qui ouvrait facilement son cœur le ferme tout aussi vite. Devant le révisionnisme, les institutions se révèlent pour ce qu’elles sont : le résultat d’arrangements circonstanciels auquel le temps a fini par donner un air de respectabilité. L’institution judiciaire, par exemple, prétend défendre la justice (une vertu !) ou la loi (une nécessité) et elle tient à nous faire croire que, dans leur ensemble, les magistrats se soucient de vérité. Or, quand les magistrats se trouvent dans l’obligation de juger un révisionniste, il fait beau voir comme ils jettent par-dessus bord les scrupules dont ils s’honorent. Pour eux, avec un révisionniste, il n’y a plus ni foi, ni loi, ni droit. L’institution judiciaire dévoile ici toute sa précarité. Quant au petit monde du journalisme et de la communication, il se révèle, plus que tout autre, soucieux de ne laisser passer que les idées ou les marchandises autorisées ; son rôle s’apparente à celui d’amuseurs publics chargés de faire croire à la libre circulation des idées et des opinions.
 
Le révisionniste vit dangereusement. Gendarmes, juges et journalistes le guettent. La prison peut l’attendre. Ou l’hôpital. Il risque de se retrouver sur la paille et sa famille avec lui. Peu lui importe. Il vit, il rêve, il imagine. Il se sent libre. Ce n’est pas qu’il se berce d’illusions sur la portée de ses découvertes. Ces découvertes font peur à tous et elles contrarient trop d’idées reçues. Elles se heurtent à deux grands mystères de l’homme : le mystère, général, de la peur et le mystère, particulier, du besoin de croire à n’importe quoi.
 
À un historien qui venait d’achever une Histoire de l’humanité en cinq volumes, on avait un jour demandé : « En fin de compte, quel est le principal moteur de l’histoire des hommes ? » La réponse, après une longue hésitation, avait été : « La peur ». Il est de fait que la peur est d’une présence écrasante et qu’elle prend chez l’homme, encore plus que chez l’animal, aussi bien les formes les plus manifestes et parfois les plus saugrenues que les déguisements les plus trompeurs. Chez beaucoup d’hommes, mais certainement pas chez tous, le mystère de la peur se combine avec un autre mystère : celui, comme je l’ai dit, du besoin, du désir ou de la volonté de croire pour croire. Les Anglais ont, pour en parler, une expression malheureusement intraduisible : « the will to believe. » Céline disait : « Le délire de mentir et de croire s’attrape comme la gale ». La Fontaine, avant lui, avait noté :
 
L’homme est de glace aux vérités,
Il est de feu pour les mensonges. 
 
Le révisionnisme peut corriger l’histoire mais il ne corrigera strictement rien de l’homme. En revanche, l’avenir lui donnera raison sur le plan de l’historiographie. Trop d’éléments sont déjà là qui prouvent que le révisionnisme progresse inexorablement. Il restera inscrit dans l’histoire comme « la grande aventure intellectuelle de la fin de ce siècle ». 
 
Rappel : Les révisionnistes ne nient pas l’existence du génocide et des chambres à gaz. C’est une erreur. Galilée ne niait pas que la terre fût fixe ; il affirmait, au terme de ses recherches, que la terre n’était pas fixe mais qu’elle tournait sur elle-même et autour du soleil. De la même façon, les révisionnistes affirment, au terme de leurs propres recherches, que génocide et chambres à gaz n’ont pas existé mais que la «solution finale de la question juive» consistait en l’émigration des juifs, si possible, et en l’évacuation des juifs, si nécessaire. 
 
Les révisionnistes cherchent à dire ce qui s’est passé ; ils sont positifs, tandis que les exterminationnistes s’acharnent à nous raconter ce qui ne s’est pas passé ; leur travail est négatif. 
 
Les révisionnistes sont pour la réconciliation des belligérants dans la reconnaissance de ce qui s’est vraiment passé.
 
25 mai 1992