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Échange de messages avec Yves Alègre, journaliste au Progrès de Lyon, à propos de l’affaire Georges Theil

1) Au préalable, texte de l’article d’Yves Alègre dans Le Progrès du 30 novembre 2005 :

Une tribune inespérée pour Robert Faurisson

Six mois de prison ont été réclamés contre Georges Theil, ex-élu FN, qui avait repris les thèses négationnistes de Bruno Gollnisch, dont le procès a été renvoyé.

Les négationnistes peuvent remercier M. Gollnisch. Grâce aux propos équivoques tenus en 2004 par le N° 2 du FN à propos des chambres-à-gaz, propos relayés par l’obscur Georges Theil dans la coulisse du Conseil régional Rhône-Alpes, M. Robert Faurisson, le père du négationnisme a pu s’offrir l’une de ses ultimes tribunes à Lyon, ville où il échafauda ses thèses sulfureuses. Un retour sur les lieux du « crime ».

La chose s’est produite devant le tribunal qui, hier, jugeait M. Theil, ex-élu FN, pour contestation de crime contre l’humanité tandis que le procès de M. Gollnisch était renvoyé. En dernière minute, en effet, la défense a fait citer M. Faurisson comme témoin. Malgré les efforts du président Schir pour recadrer les dérives – « L’existence des chambres à gaz n’est pas le débat » –, le vieil homme, étonnamment vif, a disserté une heure durant. Assénant des thèses qui lui ont pourtant valu plusieurs condamnations. Ceci, devant un parterre de jeunes gens de l’UEJF [Union des étudiants juifs de France]. La nausée a gagné l’audience. Une jeune femme qui se trouvait, elle, sur les bancs « frontistes » a été expulsée. Elle riait enfouie dans un foulard blanc : « C’est ignoble » ont lancé les juges. « C’est le système soviétique » a lancé la dame quittant la salle. Malaise.

« Il faut s’interroger sur le sens de ces procès et leur publicité » dira plus tard Me Sayn, partie civile pour le Mrap. Les chambres à gaz ? « Un fantasme d’admiration germanophile » déclarait M. Theil le 14 octobre 2004 devant les caméras de TV8 Mont-Blanc en réaction aux propos tenus 3 jours plus tôt par M. Gollnisch. Celui-ci avait alors indiqué qu’il fallait laisser « les historiens en discuter ». À la barre, M. Theil, ex-cadre de France-Télécom, émule de Faurisson, réitère ses dires : « Le Zyclon B était un désinfectant », « l’existence des chambres à gaz une aberration ».

L’homme vient d’être condamné à 6 mois de prison ferme à Limoges. À propos de loi Gayssot, il a pu dire que c’était « une loi de terreur judaïque ». « N’y a-t-il pas là un soupçon d’antisémitisme ? » a ironisé Me Jakubowicz pour la Licra. «Ces gens-là sont pourvoyeurs de mort» lancera encore l’avocat. Fustigeant des méthodes qui « font saigner la mémoire », le procureur Pellet a réclamé 6 mois de prison. Sans surprise, Me Delcroix, en défense, a crié au procès en sorcellerie via une loi qui « empêche la liberté de recherches ». Le jugement sera rendu le 3 janvier.

            Yves Alègre                                     yalegre@leprogres.fr

 

2) R. F. à Y. A. :

Monsieur,

J’ai pris connaissance de l’article que vous venez de consacrer à l’audience du procès de Georges Theil (Le Progrès, 30 novembre 2005, p. 9).

D’après un décompte qui a été établi par deux personnes distinctes, il semble que, loin d’avoir « disserté une heure durant », je serais resté 45 minutes à la barre et que je n’aurais disposé que de 20 minutes pour répondre à une série de questions qui m’ont été posées soit par le président, soit par Me Delcroix, soit, très brièvement, par Me Lorach.

Je suis disposé à vous recevoir à Vichy pour un entretien (10, Rue de Normandie, 03200 VICHY).

Vous voudrez bien tenir pour RIGOUREUSEMENT CONFIDENTIEL le document joint. Il porte sur quelques exemples de contestation, par les auteurs orthodoxes, de l’existence de crimes contre l’humanité tels que définis et punis par le TMI [Tribunal militaire international] de Nuremberg. Ce texte, dépourvu de titre et long de 5 pages, commence par « 1) En 1951 Léon Poliakov écrit… » et se termine par : « … Mais le droit à la recherche historique n’a que faire de bâillons et de liens ». Je le livre à votre réflexion.

Bien à vous.           R. Faurisson

 

3) Y. A. à R. F. :

Monsieur,

Je vous remercie de vous préoccuper de mon édification mais, à mes yeux, l’holocauste est l’horreur absolu du XXème siècle.

Avec mes salutations         Yves Alègre

 

4) R. F. à Y. A. :

Monsieur,

Où prenez-vous que je me préoccupe de votre édification ? Vous spéculez. Et vous faites erreur.

Il ne m’est jamais venu à l’esprit qu’un journaliste pouvait trouver le temps de réfléchir à ce qu’il écrit. Rassurez-vous ! À mes yeux, vous n’en êtes pas pour autant un benêt mais précisément… un journaliste.

Si je vous avais envoyé en attachement un papier sur les contestations du jugement de Nuremberg par les affirmationnistes, c’était avec l’intention de vous suggérer une enquête journalistique qui, croyez-m’en, aurait été à votre portée. Tant pis !

Par ailleurs, pourquoi m’infligez-vous un pur slogan non sans l’orner d’une faute d’orthographe ? Que veut dire « l’horreur absolu [sic] du XXème siècle » ? « Absolu » en quoi ? Avez-vous réfléchi au sens de ce mot ? À débiter des formules de propagande on ne se donne plus la peine de surveiller ni sa pensée, ni son langage, ni même son orthographe.

Cela dit, si jamais vous découvrez une preuve, une seule preuve de l’existence du crime « absolu » et de l’arme « absolue » de « l’holocauste », sonnez du shofar pour convoquer les fidèles et ouvrez-leur la porte du tabernacle (vous savez, ce tabernacle dont on interdit l’ouverture parce que tout le monde sait bien qu’il ne contient rien d’extraordinaire) pour leur montrer la merveille d’horreur qu’ils attendent depuis soixante ans et que les historiens de cour n’ont pas été fichus de leur trouver.

D’ici là, abstenez-vous de donner dans la spéculation et tentez de surveiller votre pensée, votre langage et jusqu’à votre orthographe.

Bien à vous.         RF

 

5) Y. A.  à R. F. :

Monsieur,

Dans l’idée d’horreur, il y avait peut-être l’idée du mal absolu. D’où la faute d’orhographe. Veuillez m’en excuser.

Avec mes salutations           Yves Alègre

 

6) R. F. à Y. A. :

Monsieur,

Mais non ! Voyez plutôt : vous venez de commettre à nouveau une faute en écrivant «orhographe» pour « orthographe ».

C’est ce manque d’attention qui vous fait prendre 1) des morts pour des tués, 2) des fours crématoires ou des locaux de désinfection/désinfestation pour des chambres à gaz homicides, 3) des cheveux, des chaussures ou des lunettes de récupération en temps de disette pour des cheveux, des chaussures ou des lunettes de gazés, 4) des millions de rescapés qui sont autant de preuves vivantes de ce qu’il n’y a pas eu de programme d’extermination physique pour des preuves de ce qu’il y aurait eu un réel programme d’extermination physique, 5) une « solution finale territoriale » pour une « solution finale par l’extermination » et 6) des vessies pour des lanternes.

Sans rancune, sans amertume et dans la bonne humeur.

Bien à vous.             RF

PJ : Le pêcheur, la carpe et le révisionniste.

7 décembre 2005