Combien de “juifs de France” (français, étrangers ou apatrides) ont-ils survécu à la guerre ? Les trois quarts ou les quatre cinquièmes ?

J’ai autrefois constaté et décrit les erreurs commises par Serge Klarsfeld à la fois dans la première édition de son Mémorial de la déportation des Juifs de France (1978) et dans ses Additifs, mais, pour commencer, je n’ai jamais trouvé, preuves à l’appui, combien de « juifs (français, étrangers ou apatrides) déportés de France » sont morts en déportation et, encore moins, combien d’entre ceux-ci sont morts de causes soit naturelles, soit autres.

Le « Mur des noms » situé à l’entrée du Mémorial de la Shoah à Paris, 17 rue Geoffroy-l’Asnier dans le 4e arrondissement, comporte les noms de tous les juifs déportés, y compris ceux de survivants connus. Pour un « mémorial » ou « monument commémoratif », le procédé manque de probité et il est à craindre que beaucoup de visiteurs ne s’imaginent qu’il s’agit là d’une liste de morts ou de tués alors qu’il n’est question que de déportés.

Dans Vichy-Auschwitz (Le rôle de Vichy dans la solution finale de la question juive en France – 1943-1944), Fayard, 415 p., S. Klarsfeld écrivait déjà en 1985, soit il y a près de trente ans : « Trois-quarts des Juifs de France survivaient en France à la Libération » (Introduction, p. 8). Cette courte phrase doit être lue avec attention : l’auteur n’y mentionne pas tous les « survivants » juifs mais seulement ceux qui « survivaient en France ». A ces trois quarts de survivants il convient donc d’ajouter les juifs qui, dans les années d’après-guerre, n’ont pas regagné la France (ne fût-ce que parce qu’ils n’étaient pas français ou qu’ils avaient décidé de ne pas retourner dans le pays qui les avait déportés) ; ceux-là ont gagné soit des pays européens autres que la France, soit les Etats-Unis, le Canada ou l’Argentine, soit d’autres pays encore, soit surtout la Palestine qui allait prendre, en 1948, le nom d’Etat juif ou d’Etat d’Israël. Il est donc probable que, si l’on tenait aussi compte de ces « survivants », « rescapés » ou « miraculés », on pourrait, corrigeant la phrase de S. Klarsfeld, écrire : « Quatre cinquièmes des juifs de France survivaient en France et ailleurs à la Libération ».

Le nombre des juifs qui vivaient en France en 1939 est généralement estimé à 300 000 et, à ce compte, les survivants juifs, juste après la guerre, auraient été au nombre d’environ 225 000 (dans l’hypothèse des trois quarts de survivants) ou d’environ 240 000 (dans l’hypothèse des quatre cinquièmes de survivants). Les morts (pour toutes sortes de raisons) et les disparus auraient alors été au nombre de 75 000 ou de 60 000. De telles conclusions excluraient que les Allemands aient pu observer une politique d’extermination systématique des juifs d’Europe mais encore faudrait-il prouver la justesse de ces chiffres. Ceux qui en ont les moyens craignent-ils de trouver les chiffres exacts ?

Comme il m’est déjà arrivé de le demander, comment se fait-il que, surtout avec les moyens techniques et informatiques dont nous disposons aujourd’hui et avec le flot de milliards que rapporte le Shoa(h) Business, on ne possède toujours pas en 2014 une liste informatisée et nominale concernant tous les juifs recensés en France pendant l’Occupation avec mention pour la plupart, sinon pour tous, du sort de chacun d’entre eux, qu’ils aient été déportés ou non ? Jadis j’ai, en vain, mené de longues recherches sur le sujet au Centre de documentation juive contemporaine (CDJC). Tout récemment j’ai pu interroger au téléphone une personne du CDJC qui m’a donné l’impression de bien connaître son affaire et qui m’a répondu, en ce qui concerne les seuls déportés, qu’en dépit d’une nouvelle édition, en 2012, du Mémorial… de S. Klarsfeld, il n’existait pas encore d’« étude majeure » sur le sujet et qu’on était à présent « encore dans le flou », ce qui n’empêche pas les auteurs qui s’expriment sur le site Internet du Mémorial d’écrire que, sur les « 76 000 juifs » déportés, « quelque 2 500 personnes seulement ont survécu à leur déportation ».

Enfin, pour en revenir au titre de l’ouvrage publié par S. Klarsfeld en 1985 et que j’ai mentionné plus haut, je rappelle une fois de plus que « la solution finale » n’est que la forme raccourcie d’une expression désignant la recherche de ce qui s’appelait en réalité « une solution finale territoriale de la question juive » (eine territoriale Endlösung der Judenfrage). Nationaux-socialistes et sionistes aspiraient à une telle solution mais, pour les premiers, à partir d’un certain moment, il a été exclu que le territoire en question fût celui de la Palestine, et cela à cause du « noble et vaillant peuple arabe » auquel on ne pouvait décemment pas infliger pareille infamie (voyez mon article du 28 juin 2008, « Heinrich Himmler rend compte de son entretien du 15 janvier 1945 avec Jean Marie Musy au sujet des juifs »).

Près de soixante-dix ans après la fin de la guerre, il serait grand temps de revenir à la réalité des faits et des chiffres. On l’a plus ou moins fait pour beaucoup de prétendues « chambres à gaz nazies », pour le prétendu « savon juif », pour les prétendues « peaux humaines tannées », pour les prétendues « têtes réduites », pour « la sotte histoire de Wannsee », pour le prétendu « massacre, par les Allemands, de milliers d’officiers polonais à Katyn (et deux autres lieux) », pour les prétendus « 75 000 fusillés du Parti communiste français », pour les prétendus « 4 000 000 de morts d’Auschwitz » et pour cent autres calembredaines hithcockiennes ou staliniennes. L’Histoire devra recouvrer ses droits, tous ses droits aux dépens, s’il le faut, de ce qu’on appelle complaisamment « la Mémoire ». Ce sera contrariant pour les faux témoins, les menteurs, les faussaires, les marchands du Shoa(h) Business, pour les exploiteurs de la haine éternelle et pour les perpétuels fauteurs de guerre.

Mais ce sera aussi un peu de répit – enfin ! – pour les honnêtes gens épris d’exactitude et pour les cœurs pacifiques.

L’époque s’y prête : de nos jours, les historiens de «la destruction des juifs d’Europe» font de moins en moins de place à la magique chambre à gaz nazie, une «arme du crime» jamais examinée ni même vue, jamais représentée techniquement. Récemment, les découvertes sensationnelles, faites par des Israéliens, quant à des « vestiges de chambres à gaz nazies » dans le camp de transit de Sobibor ont vite éclaté comme bulles au soleil ou comme, à Paris, la pièce de théâtre de Bernard-Henri Lévy. Quant aux mises en scènes du Père Patrick Desbois avec sa « Shoah par balles », ses 800 charniers et ses 1 500 000 juifs fusillés mais avec zéro, exactement zéro cadavre exhumé et expertisé, elle disparaît de nos écrans et devrait finir dans les poubelles de l’histoire. Certes la rengaine de la Mémoire et son tam-tam continueront mais le charme est brisé. Les jeunes générations ne marchent pas.

Et le meilleur d’Internet aidera à faire le ménage dans les écuries d’Augias.

17 octobre 2014