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Antinazisme de sex-shop

Si vous dénoncez publiquement la vogue dans la littérature holocaustique de ce que j’ai appelé «un nazisme (ou un antinazisme) de sex-shop», il vous en cuira. Si vous ajoutez que ce type de pornographie imprègne les prétendus témoignages sur «l’Holo­causte» et qu’il est présent jusque dans les récits qu’on donne à lire à la jeunesse (quand on ne les lui débite pas sur place à Auschwitz ou ailleurs), on vous le fera très cher payer.

En revanche, si vous appartenez au peuple élu et, en particulier, si vous êtes israélien, vous aurez le privilège, après avoir tiré tant de bénéfices financiers et politiques de cette pornographie mémorielle, de vous payer le luxe d’en dénoncer les abus. Le goy, lui, aura le droit, en un premier temps, de ne manifester que sa repentance et de payer sans protestation ni murmure ; puis, en un second temps, il pourra exprimer son admiration pour ces merveilleux juifs qui sont si lucides, si honnêtes et si courageux qu’ils se montrent capables de dénoncer les répugnantes inventions du Shoa-Business ou de l’industrie de « l’Holocauste ». Si le goy est révisionniste, qu’il ne s’attende pas à des excuses de la part du juif israélien qui l’avait injustement traité de menteur ou d’antisémite et qu’il n’aille pas s’imaginer qu’on lui reconnaîtra le mérite d’avoir eu raison le premier.

L’article ci-dessous et le bref rectificatif qui le suit datent du 6 et 7 septembre et proviennent du Jerusalem Journal ; ils ont été reproduits dans l’édition électronique du New York Times.

Le titre de l’article signifie : «Le dérivé inattendu pour Israël d’un procès concernant l’Holocauste». Le procès en question est celui d’Adolf Eichmann ; ce dernier a été enlevé d’Argentine en 1960, jugé et condamné en 1961 à Jérusalem et, enfin, pendu en 1962 au terme d’un procès parfaitement inique où aucune preuve n’a été apportée de ce que le IIIe Reich aurait eu une politique d’extermination des juifs d’Europe et aurait utilisé à cette fin des chambres à gaz ou des camions à gaz homicides. L’article se clôt sur une remarque d’Ari Libsker (35 ans et petits-fils de «survivants») évoquant ce « mélange “d’horreur, de sadisme et de pornographie” qui sert à perpétuer jusqu’à ce jour la mémoire de l’Holocauste dans la conscience israélienne ».

 

Jerusalem Journal                                                              6 septembre 2007

Par Isabel Kershner

Le dérivé inattendu pour Israël d’un procès concernant l’Holocauste

JÉRUSALEM, 5 sept. — C’était l’un des sales petits secrets d’Israël. Au début des années soixante, alors qu’au procès d’Adolf Eichmann les Israéliens étaient confrontés pour la première fois aux témoignages bouleversants des survivants de l’Holocauste, une série de livres de poche pornographiques appelés « Stalags » et tournant autour de thèmes nazis étaient devenus des best-sellers à travers le pays.

Lus en cachette par une génération d’Israéliens pubères, souvent enfants de survivants, les « Stalags » tiraient leur nom des camps pour prisonniers de guerre de la Seconde Guerre mondiale dans lesquels leurs récits se déroulaient. Ces livres relataient des histoires perverses de pilotes américains ou britanniques qui subissaient en captivité des sévices de la part de femmes officiers SS portant des bottes et maniant le fouet. L’intrigue s’achevait généralement par la revanche des protagonistes mâles, qui violaient et tuaient celles qui les avaient persécutés.

Après des décennies au fond d’arrière-boutiques et d’armoires poussiéreuses, les « Stalags », un mélange hébreu particulier de nazisme, de sexe et de violence, réapparaissent sur la scène publique. Et avec eux se rallume un débat sur la représentation culturelle, dans notre pays, du nazisme et de l’Holocauste et sur le point de savoir si ces derniers n’ont pas été indûment mêlés à une sorte de perversion sexuelle et de voyeurisme qui ont imprégné jusqu’aux programmes scolaires.

« J’ai pris conscience que les premières images de l’Holocauste que j’ai vues, moi qui ai grandi dans ce pays, étaient des images de femmes nues », explique Ari Libsker, dont le film documentaire Stalags : Holocaust and Pornography in Israel a été projeté pour la première fois au festival du film de Jérusalem en juillet et doit être diffusé en octobre et distribué dans les salles de cinéma. « Nous étions à l’école primaire », a-t-il rapporté. « Je me souviens à quel point nous étions mal à l’aise. »

Hanna Yablonka, professeur d’histoire à l’université Ben Gourion du Néguev, dit que le film fait ressortir ce qu’elle appelle « les aspects sensationnalistes de l’enseignement de la mémoire de l’Holocauste ».

Elle pose la question : « Est-ce que nous entrons là dans le domaine de la semi-pornographie ? » « La réponse est : oui. »

Les « Stalags » étaient pour ainsi dire la seule pornographie à laquelle avait accès la société israélienne, quasi puritaine, du début des années soixante. Ils ont disparu presque aussi soudainement qu’ils étaient apparus. Deux ans après qu’on se fut arraché la première édition aux kiosques de la gare routière centrale de Tel Aviv, un tribunal israélien avait condamné les éditeurs pour diffusion de matériel pornographique. Le « Stalag » le plus célèbre, J’étais la pute attitrée du colonel Schultz, passait pour avoir franchi toutes les bornes de l’acceptable et avait incité la police à essayer de traquer tous les exemplaires.

Cessant d’être imprimés et entrant alors dans la clandestinité, les « Stalags » ont circulé dans des librairies spécialisées d’occasion et parmi des groupes secrets de collectionneurs.

Pour la première fois, le documentaire de soixante minutes de M. Libsker place les « Stalags » sous les feux des projecteurs et révèle quelques vérités gênantes. L’une d’entre elles est que les « Stalags » étaient un genre spécifiquement israélien, créé par des éditeurs israéliens et écrit par des auteurs israéliens alors que ces derniers les avaient faussement présentés comme étant traduits de l’anglais et les avaient écrits à la première personne pour faire croire à d’authentiques mémoires.

Jusqu’au procès Eichmann qui débuta en 1961, les voix de l’Holocauste ne s’étaient guère fait entendre en Israël. Les survivants étaient sensibles à la méfiance des anciens qui leur reprochaient de n’avoir pas émigré à temps et les interrogeaient sur les actes immoraux qu’ils avaient pu commettre pour rester en vie.

Dans le film, l’éditeur du premier « Stalag », Ezra Narkis, reconnaît que ce fut le procès Eichmann, avec tous ses détails sensationnels et souvent sanglants, qui donna une impulsion au genre.

De manière plus provocante, le film prétend que la pornographie du « Stalag » ne fut qu’une extension populaire des écrits de K. Tzetnik, premier auteur à raconter l’histoire d’Auschwitz en hébreu et héros des classiques traditionnels de l’Holocauste. K. Tzetnik « a ouvert la voie » et « les auteurs de “Stalags” ont beaucoup appris de lui », dit M. Narkis.

K. Tzetnik était un pseudonyme de Yehiel Feiner De-Nur. Ce nom d’emprunt, un abrégé de l’allemand pour « détenu de camp de concentration », avait pour but de représenter tous les survivants, une espèce de M. Toulemonde de l’Holocauste. Un des plus grands succès littéraires de K. Tzetnik, Maison de poupée, publié en 1953, racontait l’histoire d’un personnage censé être la sœur de l’auteur au service de la SS en qualité d’esclave sexuelle au Block 24, le tristement célèbre « Block du plaisir » à Auschwitz.

Bien que devenu un classique de l’Holocauste, beaucoup d’universitaires le qualifient à présent de pornographique et estiment qu’il a vraisemblablement été fabriqué. « C’était de la fiction », dit Na’ama Shik, chercheur à Yad Vashem, mémorial national du souvenir des martyrs et héros de l’Holocauste. « Il n’y avait pas de putains juives à Auschwitz. »

Pourtant, en Israël, aux yeux de bien des gens, Maison de poupée ainsi que d’autres écrits de K. Tzetnik, mort en 2001, sont considérés comme reflétant des faits historiques et ces ouvrages font partie du programme des collèges et lycées. Le film de M. Libsker montre le directeur adjoint d’une école israélienne en train de guider un groupe d’adolescents à travers Auschwitz, il désigne du doigt le Block 24 et cite Tzetnik à son propos.

Cette approche de l’enseignement de l’Holocauste est évitée par un nombre croissant d’universitaires israéliens. « L’Holocauste a été assez horrible comme ça sans qu’on en rajoute », a dit le professeur Yablonka.

Sidra Ezrahi, professeur de littérature juive comparée à l’Université hébraïque de Jérusalem, a déclaré : « Ses livres étaient si crus et si primitifs ! » « Peut-être ont-ils eu au début un impact important, mais avec le temps », ajoute-t‑elle, « si c’est là ce qu’ils ont choisi de laisser dans le programme israélien, c’est scandaleux. »

Pour beaucoup d’Israéliens, la partie la plus frappante du procès Eichmann fut la déposition de K. Tzetnik. Sa véritable identité fut révélée pour la première fois à la barre des témoins, où il s’évanouit. Au même moment les « Stalags » atteignaient l’apogée de leur succès commercial.

Yechiel Szeintuch, professeur de littérature yiddish à l’Université hébraïque, rejette tout lien entre les « Stalags » orduriers et les écrits de K. Tzetnik et le considère comme un « péché originel ». Il affirme avec force que l’œuvre de K. Tzetnik s’appuyait sur la réalité.

Mais M. Libsker, 35 ans, lui-même petit-fils de survivants de l’Holocauste, soutient que c’est le même mélange d’« horreur, de sadisme et de pornographie » qui sert à perpétuer le souvenir de l’Holocauste dans la conscience israélienne encore aujourd’hui.

Rectification en date du 7 septembre 2007 :

L’article d’hier du Jerusalem Journal sur les livres de poche pornographiques tournant autour de thèmes nazis et circulant en Israël dans les années soixante a rapporté de façon inexacte les propos de Na’ama Shik, chercheur à Yad Vashem, mémorial national du souvenir des martyrs et héros de l’Holocauste : parlant du livre de poche Maison de poupée, où il était question d’une femme juive employée du bordel tristement célèbre qui, à Auschwitz, portait le nom de « Block 24 », elle avait dit que c’était le livre, et non pas le Block 24, qui relevait de la fiction.

8 septembre 2007