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Une lettre de M. Faurisson (Le Monde, 16 décembre 1978)

M. Robert Faurisson, cité dans Le Monde des 18, 19-20 et 22 novembre et des 2 et 9 décembre, nous adresse, en invoquant le droit de réponse, la lettre suivante. Le Monde reviendra sur ce sujet.

Ne niez jamais ! Pour avoir nié, comme Paul Rassinier et vingt autres auteurs révisionnistes, l’existence des « chambres à gaz » hitlériennes, je me vois traiter depuis quatre ans, par les plus hautes instances universitaires, de « nazi », de « fou », de « Savonarole », de « jésuite », de personnage « nocif ». Or, avant 1974, j’étais non moins officiellement tenu pour un « très brillant professeur », un « chercheur très original », un homme doté d’une « personnalité exceptionnelle », un enseignant aux « remarquables qualités intellectuelles et pédagogiques » ; mes publications avaient « fait grand bruit » et ma soutenance de thèse en Sorbonne avait été jugée « étincelante ».

Le 16 novembre 1978, un journal qui avait obtenu un entretien de M. Bernadet (président de mon université) publiait sur mon compte d’abominables calomnies en préface à un montage de « déclarations » que j’avais faites sur le mensonge des « chambres à gaz ». M. Bernadet faisait immédiatement placarder l’article et l’accompagnait d’une affiche invitant les chers collègues à venir signer à la présidence un registre de protestations contre mes « déclarations ». Pour sa part, il déclarait à un autre journal que mon « équilibre intellectuel » était peut-être « atteint » et qu’il ne pourrait plus assurer ma sécurité. Dans un communiqué, puis dans une conférence de presse, il dénonçait le « caractère scandaleux » de mes « affirmations », qui, par ailleurs, « ne repos(ai)ent sur aucun fondement sérieux et ne mérit(ai)ent que le mépris ».

En accord avec le recteur, M. Bernadet prend ensuite un arrêté de suspension de mes enseignements. Ni l’un, ni l’autre ne m’en préviennent à temps et je tombe dans un véritable guet-apens. Des éléments étrangers à notre université pénètrent jusqu’à mon bureau. M. Bernadet, qui est tout près de là et qui sait ma présence sur les lieux ainsi que ces allées et venues de gens excités, ne fait rien. Un petit groupe d’entre eux m’insulte et me prend en chasse dans les couloirs de l’université. Ce groupe me rattrape à la sortie. Il me rosse sur le trottoir. Puis il me reprend en chasse et m’agresse à nouveau, ainsi qu’un de mes étudiants. Depuis trois ans, grâce à M. Bernadet, je suis un maître de conférences dont on bloque toute possibilité d’avancement parce que – motif officiel – outre que je réside à deux heures de Lyon, je n’ai, paraît-il jamais rien publié de ma vie, et cela « de (m)on propre aveu » ! Pour fonder son accusation, M. Bernadet a sorti de son contexte une phrase d’une lettre où je lui disais mon étonnement de m’entendre traiter de « nazi » alors que je n’avais jamais rien publié… qui pût le laisser croire (lettre, dont il ose donner lui-même la référence, du 12 décembre 1975). Cette stupéfiante accusation allait ensuite être confirmée par mon ministre, puis, tout récemment, par le Conseil d’État, aux yeux de qui les motifs invoqués contre moi ne sont pas « matériellement inexacts » (la liste de mes publications figurait pourtant dans mon dossier) ! Je n’engagerai pas ici de discussion avec M. Bernadet et je ne relèverai pas dans sa lettre, d’autres graves inexactitudes, habiletés et omissions. J’attends un débat public sur un sujet que manifestement on esquive : celui des « chambres à gaz ». Au Monde que, depuis quatre ans, je sollicite en ce sens-là, je demande de publier enfin mes deux pages sur « La rumeur d’Auschwitz ». Le moment en est venu. Les temps sont mûrs.

16 décembre 1978

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Publiée dans Serge Thion, Vérité historique ou vérité politique ?, La Vieille Taupe, Paris 1980, p. 102-103.