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La Shoah : des images de fiction et une simple croyance ?

Le Monde, journal oblique (suite)

L’exposition de photographies « Mémoire des camps », qui se tient actuellement à Paris, à l’hôtel de Sully, suscite l’inquiétude de certains milieux juifs. Cette exposition, où l’on s’est préoccupé d’éliminer quelques faux un peu trop voyants, rend criante, au siècle matérialiste de l’image, de la photographie et de la télévision, l’absence de toute photographie et de tout élément matériel qui prouverait que les juifs ont été les «victimes d’une extermination industriellement programmée». Ces derniers mots sont de Jacques Mandelbaum, journaliste attitré du Monde. Dans un article intitulé : « La Shoah et ces images qui nous manquent » (25 janvier 2001, p. 17), il ne cache pas sa perplexité.

Il écrit qu’« on ne dispose pas d’images [vraies] qui rendent compte de ce crime ». Il parle, à propos d’Auschwitz, d’« images de propagande » soviétique. Il ajoute :

Certaines de ces images [de propagande soviétique] n’en furent pas moins réutilisées plus tard comme de véritables documents d’archives. Toutes les images connues, s’agissant de ce crime-là, sont donc, sinon fausses, du moins inappropriées. Y compris, et peut-être surtout, celles des monceaux de cadavres découverts dans les camps de concentration, dont la spectaculaire horreur est encore loin de compte.

Il rappelle qu’en raison même de l’inexistence d’ images vraies on a eu « la possibilité d’en produire par le biais de la fiction » et il pense que la fiction « est en passe de s’imposer ». Nous voici donc, selon lui, réduits au « pathos consolateur de la fiction ». Les organisateurs de cette exposition osent affirmer, après Jean-Claude Pressac, que telle photographie avait été prise à Auschwitz depuis une chambre à gaz. Sceptique, le journaliste demande : « depuis une chambre à gaz ou depuis un autre bâtiment ? ».

En dépit des objections des révisionnistes à ce sujet, certains auteurs avaient osé prétendre que, sur des photographies prises par des aviateurs alliés en 1944 au-dessus du complexe d’Auschwitz, on pouvait distinguer les bâtiments des chambres à gaz homicides. J. Mandelbaum constate que, sur ces photographies, on peut déchiffrer d’Auschwitz toutes les « choses existantes, sauf la présence des chambres à gaz ». Il revient sur « l’insupportable manque des images [vraies] de l’extermination » et il évoque une polémique entre auteurs exterminationnistes «littéralement hantée par l’absence quasi totale de photos relatives à l’extermination». Au passage, il s’en prend à « la maladresse des organisateurs » de l’exposition.

Somme toute, cette Shoah, dont il maintient, bien sûr, le caractère historique, se réduit pour le moment, d’une part, à des images fictives (il dit : des « images largement inappropriées ») et, d’autre part, à une croyance, elle-même fondée sur des images de fiction.

Il conclut :

Si voir, c’est croire, comment admettre dès lors, s’agissant de la Shoah, que l’image [vraie] est précisément ce qui manque ?

Cette dernière question, qui est claire, et toutes ces remarques, qui ne manquent pas de vigueur, s’extraient à grand-peine d’un amas au style pâteux. Le journaliste multiplie les contorsions de langage et s’exprime en un français de yeshiva. Il cherche simultanément à sauver la mise holocaustique et, peut-être bien aussi, à préserver ses arrières et les arrières de son journal. Ainsi Le Monde, le jour où il faudra larguer le mythe de la Shoah, pourra-t-il se prévaloir de cet article de J. Mandelbaum et de quelques autres articles tout aussi obliques.

Il y a plus de vingt ans, sous la poussée révisionniste, Pierre Vidal-Naquet et ses coreligionnaires ont commencé à battre en retraite et à dénoncer quelques-uns des plus gros mensonges de leur propagande. Au fil des ans, ils ont pris l’habitude de mettre ces inventions fallacieuses sur le compte des communistes, des Russes ou des Polonais. Ici, il appert que c’est aux Soviétiques que le journaliste du Monde impute la fausse monnaie d’Auschwitz.

25 janvier 2001