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La béatification de Mgr von Galen

Le dimanche 9 octobre 2005, à Rome, Clemens-August von Galen (1878-1946), comte et évêque de Münster (Rhénanie du Nord-Westphalie), a été béatifié. À cette occasion, le journaliste Henri Tincq écrit : « Exceptionnellement présent, Benoît XVI a loué son “courage héroïque” pour défendre “les droits de Dieu, de l’Eglise et de l’homme, que violait le régime nazi au nom d’une idéologie néo-païenne aberrante” » (Le Monde, 12 octobre 2005, p. 3). H. Tincq, qui toujours donne dans la surenchère en vogue, ne manque pas de clore son article sur la remarque suivante :

L’hommage qui lui a été rendu à Rome n’est pas contesté, mais les historiens rappellent que, si l’évêque de Münster a prononcé des sermons fameux contre le régime hitlérien, von Galen ne fut pas un résistant de la première heure au nazisme.

Rectifions d’abord un point : cette « idéologie néo-païenne », comme l’appelle notre journaliste, a pu être celle de quelques cercles nationaux-socialistes mais Adolf Hitler, pour sa part, ne la partageait pas du tout. Ajoutons ensuite que le «régime hitlérien» a toléré tous ces sermons du « lion de Münster » et n’a pas infligé à l’évêque un seul jour d’emprisonnement. Sans doute ledit régime craignait-il, en cas de sanction, de susciter la réprobation d’une partie de la population allemande. Ce qui fait dire à certains que, dans le domaine de la tolérance en matière de religion comme en d’autres domaines, il n’y avait pas de commune mesure entre, d’une part, la dictature hitlérienne et, d’autre part, la dictature stalinienne, soutenue par les grandes démocraties.

Ce qu’omet de rappeler le journaliste du Monde, c’est qu’après la défaite du Troisième Reich, Mgr von Galen a dénoncé avec vigueur les ignominies perpétrées par les « libérateurs » de son pays. Il l’a fait, dès le 1er juillet 1945, lors d’un pèlerinage des diocésains de Münster. Il a dénoncé « la mise à sac de nos demeures détruites par les bombes », « le pillage de nos maisons et de nos fermes par des bandes de voleurs armés », les « assassinats d’hommes sans défense », « les viols de femmes et de jeunes filles allemandes par des êtres lubriques transformés en bêtes sauvages », l’indifférence des forces d’occupation devant le risque de «famine sur le territoire allemand», toutes ces horreurs trouvant leur justification dans l’idée que « tous les Allemands sont des criminels qui méritent le plus lourd châtiment, y compris la mort et l’extermination ! » (ja Tod und Ausrottung !).

Le texte intégral du sermon peut être trouvé à la Zeitgeschichtliche Forschungsstelle d’Ingolstadt, dont le directeur, le Dr Alfred Schickel, vient précisément de rédiger, en hommage à Mgr von Galen, un texte intitulé : « Ein furchtloser Kirchenmann und Anwalt seines Volkes » (Un intrépide homme d’église et défenseur de son peuple).

      16 octobre 2005