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Bilan d’une seule journée de la chasse aux hérétiques, en France

La seule journée du 2 avril 1998 connaît six succès dans la chasse aux hérétiques : 
 
1) Maurice Papon, 87 ans, est condamné à dix ans de prison par la cour d’assises de la Gironde pour complicité de crimes contre l’humanité commis 56, 55 et 54 ans auparavant. Il est, de plus, condamné à la privation de ses droits civiques, civils et de famille. On lui retire sa Légion d’honneur. En réalité, il n’a commis aucun crime puisque de hauts responsables juifs appartenant pendant la guerre à l’Union générale des Israélites de France (UGIF) ou à l’encadrement de certains camps de détention de juifs se sont rendus coupables d’actions infiniment plus graves mais, dès 1944-1945, des « tribunaux d’honneur » juifs ont décidé de tenir ces actions pour nulles et non avenues. Le lendemain de sa condamnation, M. Papon a été, au surplus, condamné à verser 4,6 millions de francs à ses victimes ;
 
2) Jean-Marie Le Pen, 69 ans, est condamné par le tribunal de Versailles à deux ans d’inéligibilité, à trois mois de prison avec sursis, à 20.000 F d’amende, à 20.000 F de dommages-intérêts et à d’autres peines encore, pour violences en réunion et injures publiques alors que la plaignante elle-même, une députée socialiste, a dû admettre qu’elle n’avait pas été frappée à l’occasion d’une violente manifestation à laquelle elle participait contre J.-M. Le Pen ;
 
3) L’historien Gérard Chauvy et son éditeur (éditions Albin Michel) sont condamnés par la XVIIe chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris à 60.000 F et 100.000 F d’amende pour diffamation publique à l’encontre de deux communistes : Raymond Aubrac, né Samuel, et Lucie Aubrac. Ils sont aussi condamnés, solidairement, à verser 400.000 F de dommages-intérêts, et cela sans compter d’autres peines encore. G. Chauvy avait publié Aubrac. Lyon 1943, ouvrage parmi les pièces duquel figurait le « Testament de Klaus Barbie », document tabou ;
 
4) Vincent Reynouard, 28 ans, reçoit, en Bretagne, la visite matinale de la gendarmerie à son domicile ; son tout nouvel ordinateur, des livres, des documents sont saisis ; 
 
5) Dans la journée, le même V. Reynouard apprend que le tribunal administratif de Caen vient de rejeter sa requête contre sa révocation de l’Éducation nationale pour révisionnisme ;
 
6) Sous le titre « Vigilance pour la culture et la création », Le Monde publie un article de Catherine Trautmann, ministre socialiste de la Culture, annonçant l’installation d’un comité de vigilance « en état de veille permanente » chargé de recueillir tous les faits, toutes les déclarations imputables au lepénisme ou au révisionnisme. Une semaine plus tard, le 9 avril, le comité sera constitué, avec vingt-deux personnalités parmi lesquelles Tahar Ben Jelloun, Ariane Mnouchkine, Jean Nouvel et Michel Piccoli (Le Monde, 11 avril).
 
11 avril 1998