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Benoît XVI dénonce chez les musulmans l’absence de “raison”

Le discours prononcé, ce 12 septembre, par Benoît XVI à l’Université de Ratisbonne (Regensburg) a fait grand bruit mais combien de ceux qui l’ont commenté l’ont-ils lu dans sa version originale allemande et dans son intégralité ? Il est à craindre que les traductions partielles qu’on a pu en trouver dans la presse française n’aient pas permis de s’en faire une idée précise ; quant à la traduction, réputée complète, que Le Monde a mise en ligne, elle porte un titre fautif, elle est amputée des premiers mots et elle omet de brefs fragments du discours.

Prononcé en allemand, ce discours porte pour titre Foi, Raison et Université : souvenirs et réflexions. On le trouve sur le site du Vatican avec le copyright de la Libreria Editrice Vaticana. Prenant la parole dans le grand amphithéâtre (Aula Magna) de l’université en question, le Pape s’est adressé à un parterre choisi. Ses premiers mots ont été : «Éminences, Magnificences, Excellences, Mesdames et Messieurs » ; parmi ces « Magnificences » figurait le recteur. S’adressant à une assistance principalement constituée d’universitaires et de scientifiques, l’orateur a émaillé son discours de mots grecs et latins. La substance et le ton de ses propos étaient ceux d’un professeur de théologie enclin au pédantisme et parfois brumeux. L’examen du vocabulaire permet deux surprenantes constatations. La première tient à la fréquence à laquelle est revenu chez ce théologien, qui en faisait la vibrante apologie, le mot de « raison » (Vernunft) : une quarantaine de fois en un texte de six pages ! La seconde tient à la fréquence à laquelle ce représentant d’une religion dite universelle a employé des mots qui donnent l’impression que la Grèce, Rome et l’Europe sont comme au centre du monde : à eux seuls les mots évoquant la pensée grecque, hellénique ou socratique sont apparus une trentaine de fois ! L’idée directrice de l’orateur a été que la religion catholique romaine est la seule religion où la foi et la raison sont idéalement fondues: « la foi biblique » (Ancien Testament juif et Nouveau Testament) et « le questionnement grec ». C’est à la Grèce que cette religion serait redevable de l’apport si précieux du « logos » (raison). Un tel héritage de richesses bibliques et grecques, un tel trésor de foi et de raison conjuguées seraient à préserver contre toutes les hérésies ou dérives réformistes, modernistes, scientistes ou irrationalistes que la religion catholique romaine a pu connaître dans le passé et dont elle est menacée aujourd’hui.

Mais, par contraste, la religion musulmane, elle, a été décrite comme dépourvue de toute une part de ces richesses, car il lui manquerait « la raison » aussi appelée le «logos».

À l’adresse d’un Persan, une attaque de la religion musulmane

Dès les alinéas 2 et 3 de son discours, le Pape annonce franchement la couleur. Il cite un « docte empereur byzantin » de confession chrétienne, Manuel II Paléologue, qui, vers la fin du XIVe siècle, dans une controverse l’opposant à un « Persan lettré » de confession musulmane, aurait montré la supériorité de sa religion sur celle de son interlocuteur car dans la conception que les chrétiens se font de Dieu il y a place pour la raison tandis que chez Mahomet il n’y a pas de raison. Voici l’intégralité de ces deux alinéas introductifs :

Tout cela [sur l’université où j’enseignais autrefois] m’est revenu à l’esprit quand j’ai lu récemment la partie éditée par le professeur Theodore Khoury (Münster) du dialogue que l’empereur byzantin érudit Manuel II Paléologue mena en 1391 durant son séjour d’hiver à Ankara avec un Persan lettré sur le Christianisme et l’Islam et la vérité des deux [religions]. C’est probablement l’empereur lui-même qui retranscrivit ce dialogue durant le siège de Constantinople, entre 1394 et 1402 ; ainsi s’explique aussi pourquoi ses propres développements sont reproduits beaucoup plus en détail que ceux de son interlocuteur persan. Le dialogue porte sur la totalité du domaine des structures religieuses de la Bible et du Coran et tourne spécialement autour de l’image de Dieu et de l’homme mais toujours aussi nécessairement autour de la relation entre – comme on disait alors – « les trois lois » ou « les trois ordres de vie » : l’Ancien Testament, le Nouveau Testament, le Coran. Aujourd’hui, dans cette conférence, je n’en traiterai pas et je ne prendrai dans la construction de la totalité du dialogue qu’un point marginal – qui dans le contexte du thème « foi et raison » m’a le plus fasciné (fasziniert) et qui servira de point de départ à mes réflexions sur ce thème.

Dans le septième échange de propos (dialexis ou controverse) éditée par le professeur Khoury l’empereur aborde le thème du Djihad, de la guerre sainte. L’empereur savait certainement que, dans la sourate II, 256, on peut lire : «Aucune contrainte dans les choses de la foi». C’est là un texte de la période initiale, disent les experts, durant laquelle Mahomet était lui-même encore sans pouvoir et menacé. Mais naturellement, l’empereur connaissait aussi les prescriptions consignées et plus tard fixées dans le Coran concernant la guerre sainte. Sans entrer dans les détails comme la différence de traitement entre «les peuples du Livre [juifs et chrétiens]» et « les incroyants », il se tourne vers son interlocuteur d’une manière abrupte, étonnante, et pour nous stupéfiante, tout simplement en lui posant la question centrale du rapport entre religion et violence. Il lui dit : « Montre-moi donc ce que Mahomet a apporté de nouveau et tu ne trouveras que du mauvais et de l’inhumain comme le fait qu’il a prescrit de propager par l’épée la foi qu’il prêchait ». Après avoir ainsi porté ce coup, l’empereur justifie ensuite minutieusement les raisons pour lesquelles la propagation de la foi par la violence est absurde. Elle est en contradiction avec la nature de Dieu et avec la nature de l’âme. « Dieu ne trouve pas de plaisir au sang, dit-il ; et ne pas agir selon la raison, ne pas agir « syn logo » [avec raison] est contraire à la nature de Dieu. La foi est le fruit de l’âme et non du corps. Celui qui veut conduire quelqu’un vers la foi a besoin de l’aptitude au bon discours, à la juste pensée et non de la violence et de la menace … Pour convaincre une âme raisonnable on n’a besoin ni de bras, ni d’instruments pour frapper, ni non plus d’un moyen quelconque par lequel on peut menacer quelqu’un de mort … »

Une attaque confirmée et insistante

À supposer que cette controverse ait vraiment eu lieu et que ce Persan ait réellement existé, il est facile d’imaginer ce que ce dernier aurait pu répliquer à l’empereur sur le chapitre, par exemple, des Croisades et de l’Inquisition en matière de propagation de la foi par la violence. Il est à ce propos étonnant que Benoît XVI, s’interrogeant sur « Foi et raison », n’ait pas fait la moindre allusion dans tout son discours à certaines pages sombres de l’histoire chrétienne ou papale. Il se déclare « fasciné » par les réflexions de l’empereur chrétien sur le Djihad, mot ici entendu au sens de «guerre sainte». Il en est tellement « fasciné » qu’il a décidé de choisir cette impériale et chrétienne réflexion pour point de départ de son discours. Il ne s’agit donc pas pour lui d’un détail ou d’une remarque faite en passant. Quand il précise que l’empereur s’adresse à son interlocuteur musulman « d’une manière abrupte, étonnante et pour nous stupéfiante », il n’exprime pas une réserve sur le fond mais glisse une remarque sur la forme, c’est-à-dire sur la rude franchise du temps. Le propos de Manuel II le « fascine » au point que, dans l’ensemble de son discours, il nommera dix fois l’empereur (der Kaiser), dont une première fois dans son introduction et une dernière fois dans la fin de sa conclusion. Dans l’alinéa qui suit les deux alinéas susmentionnés, il déclare :

La phrase décisive dans cette argumentation contre la conversion par la violence est la suivante : ne pas agir selon la raison est contraire à la nature de Dieu. L’éditeur, Theodore Khoury, commente ainsi : Pour l’empereur, un Byzantin éduqué dans la philosophie grecque, cette phrase est évidente.

Par contraste, le Pape nomme un auteur musulman, Ibn Hazm, pour lequel l’absolu divin est tel que Dieu pourrait se passer de toute raison, ne serait pas même engagé par sa propre parole et pourrait ne pas nous révéler la vérité. Puis, le Pape revient sur ce Kaiser, qui lui tient tant à cœur, et le cite à nouveau traitant de Dieu qui, selon la conception chrétienne, « agit syn logo, avec le logos. Le logos est la raison ». Dans le sixième alinéa, il s’en prend une nouvelle fois à Ibn Hazm et à sa conception d’un Dieu dont «la transcendance et la différence sont tellement exagérées». Tout à la fin de son discours, c’est dans les termes suivants qu’il évoque une dernière fois l’empereur :

L’Occident est depuis longtemps menacé par cette aversion contre les interrogations fondamentales de sa raison et il pourrait en subir un grand dommage. Le courage de s’ouvrir à l’amplitude de la raison et non le refus de sa grandeur, tel est le programme avec lequel une théologie soumise à la foi biblique entrera dans le débat du temps présent. « Ne pas agir selon la raison, ne pas agir avec le logos est contraire à la nature de Dieu » a déclaré Manuel II à son interlocuteur persan à partir de son image chrétienne de Dieu. C’est à ce grand logos, à cette vastitude de la raison, que nous invitons nos interlocuteurs dans le dialogue des cultures. La retrouver nous-mêmes et toujours, c’est la grande tâche de l’université.

Une attaque aux motifs obscurs

Le Pape aspire donc à un « dialogue des cultures », y compris la culture musulmane, mais, comme on le voit, il le fait sous l’invocation, en quelque sorte, d’un empereur chrétien, Manuel II Paléologue, pour qui la religion de Mahomet est insensée. En outre, ce dialogue se tiendrait dans le champ de la foi et de la raison mais au sens où l’entend l’Église catholique romaine. Le Pape donne ici l’impression de parler avec l’autorité de la puissance invitante. Pour finir, il appelle, en ce jour, l’université, les scientifiques et les professeurs à collaborer avec lui dans la propagation d’un type étroitement défini de « dialogue des cultures ».

L’empereur Manuel II, à la fin du XIVe siècle, adressait ce genre de message, sur un ton abrupt, à un Persan de confession musulmane. Le Pape Benoît XVI, lui, à l’aube du XXIe siècle, adresse, sur un ton différent, le même message au monde entier mais non sans viser en particulier le monde musulman et, peut-être, encore plus particulièrement, la Perse ou l’Iran d’aujourd’hui.

On se demande quels motifs et quels conseillers ont pu le pousser à développer à l’adresse du monde entier une telle « leçon » dans une université allemande. Pensait-il sérieusement que le monde musulman accepterait sans vive protestation d’entendre de tels propos et de recevoir une telle leçon ?

Une partie du monde musulman a réagi avec fureur, donnant ainsi l’impression du fanatisme religieux. De leur côté, l’attitude de nombreux Occidentaux a trahi consternation ou embarras. En revanche, bien des juifs n’ont pu dissimuler leur satisfaction, puis se sont portés au secours du Pape quand ils ont vu que des autorités et des foules musulmanes le vilipendaient. Jusque-là Benoît XVI ne cessait, avec une soumission toute allemande, de donner des gages aux juifs mais, s’y prenant lourdement, il leur avait déplu. En particulier, lors de sa visite d’Auschwitz, il avait cru bien remplir son devoir de mémoire juive en mettant « le crime » de la Shoah sur le compte d’un « groupe de criminels » ; il se trompait : les juifs ne l’entendaient pas de cette oreille, eux pour qui c’est le peuple allemand tout entier qui doit se voir infliger au fer rouge le signe de Caïn. Bref, ce pape semble porté à commettre des déclarations qui l’obligent ensuite, en un premier temps, à déplorer qu’on ait mal saisi ses intentions, puis, en un second temps, à exprimer ses regrets pour les « malentendus » ainsi créés. Cela dit, une réaction très modérée à son discours et aux manifestations de colère vaut d’être notée : celle d’un Persan, d’un Iranien, le président de la République islamique d’Iran. Elle est celle d’un esprit particulièrement fin que les médias occidentaux se plaisent à décrire comme un fanatique. Mahmoud Ahmadinejad a préconisé l’apaisement.

Une possible explication

Personnellement, j’ai surtout cherché à savoir ce que le Pape avait exactement dit dans son discours de Ratisbonne. Ma conclusion est qu’il s’y est livré à une sorte de leçon de théologie, de philosophie et de morale qui visait principalement les musulmans. Je donne donc raison aux médias, qui, résumant avec hardiesse les propos du Pape, ont mis l’accent sur la phrase où Manuel II Paléologue s’en prend de manière franche et abrupte à la religion de Mahomet : « Montre-moi donc ce que Mahomet a apporté de nouveau et tu ne trouveras que du mauvais, de l’inhumain comme le fait qu’il a prescrit de propager par l’épée la foi qu’il prêchait. » Mais, quant à savoir pourquoi le Pape s’en est ainsi pris à la religion musulmane, je note que les commentateurs qu’il m’est arrivé de lire ou d’entendre ne se sont pas posé la question ou bien n’ont pas apporté de réponse bien claire. Traiter Benoît XVI de «gaffeur» ne nous aide pas à comprendre pourquoi c’est cette « gaffe »-là qui a été commise, et nulle autre.

Peut-être son attaque intempestive contre la religion musulmane vient-elle, chez le vieil homme, de l’angoisse à constater en Europe, berceau du christianisme, l’effondrement de la pratique chrétienne et la montée de la pratique musulmane. Il se peut aussi qu’il craigne pour l’avenir ce conflit entre civilisations, cultures et religions dont parlent certains et qu’il s’imagine que le danger principal vient des pauvres de l’Orient plutôt que de l’Occident surarmé et de l’Etat colonial juif instauré en Palestine. Il pourrait enfin nourrir un faible pour le conservatisme politique, voire pour le néo-conservatisme à la manière américano-juive. Rien de tout cela n’est à exclure mais peut-être aussi – et ce sera là mon hypothèse – la cause est-elle à chercher dans le lointain passé du jeune Allemand Josef Ratzinger, qui a autrefois porté, sans le vouloir, nous dit-il, l’uniforme des Jeunesses hitlériennes. Depuis plus de soixante ans, brûlé par cette tunique de Nessus, il se sent, comme tout Allemand, accablé par le péché capital que son pays aurait, paraît-il, commis, celui du prétendu génocide des juifs. Ses prédécesseurs Jean XXIII, Paul VI et surtout Jean-Paul II ont accumulé toutes les formes possibles d’allégeance aux juifs, même les plus saugrenues. Jean-Paul II est allé jusqu’à faire d’Auschwitz un nouveau Golgotha. À la demande des juifs il a chassé du nouveau Golgotha les religieuses catholiques et fait enlever la croix des chrétiens. Il a canonisé Edith Stein et, pour l’occasion, a osé affirmer au cours de son homélie que la sainte avait trouvé la mort dans une «chambre à gaz». C’est dans cette atmosphère de repentir et de repentance maladive que J. Ratzinger a lui-même œuvré au Vatican à l’ombre de ses prédécesseurs. Élu pape à son tour, il n’allait pas déroger. Au contraire, maintenant que le monde entier allait savoir son appartenance passée à l’organisation diabolique des Jeunesses hitlériennes, il lui fallait impérativement en ajouter dans l’allégeance au peuple qui se décrit comme le martyr par excellence du monde entier. Benoît XVI est de ceux qui «prient pour la paix au Proche-Orient» mais en mettant sur le même plan le colon juif et le colonisé palestinien, que ce dernier soit musulman ou chrétien. À ses yeux, l’Armée juive et l’État juif ne semblent pas encourir de responsabilité particulière dans la situation catastrophique du Proche et du Moyen-Orient. Restent donc ces musulmans fanatisés et inaccessibles à la raison, au « logos » des Grecs, de l’Europe et de l’Occident, et cela aussi bien à Gaza, en Cisjordanie, au Liban qu’en bien d’autres pays islamiques et, surtout peut-être, en Iran. Il convient de ramener ces malheureux à la raison.

Il est peut-être là le motif profond du pape allemand : se concilier enfin les juifs en dénonçant le fanatisme musulman. Mais J. Ratzinger s’y est pris trop naïvement, trop lourdement. La surenchère n’a pas payé et l’opération a échoué. Aujourd’hui, certains intellectuels juifs vont jusqu’à lui en faire le reproche. Demain, quand il lui faudra calmer la tempête, il nous expliquera qu’il n’a pas dit… ce qu’il a pourtant bel et bien dit.

Note complémentaire sur Benoît XVI et l’Ancien Testament

S’il est un ouvrage où se rencontrent souvent les appels à la haine, à la vengeance, à l’extermination physique de peuples entiers (hommes, femmes, enfants, y compris les vieillards et les nourrissons, et sans oublier les troupeaux), c’est bien la Bible des juifs, cet Ancien Testament que mentionne élogieusement Benoît XVI. Selon Isaïe (13, 15-16), Babylone sera châtiée : « Tous ceux qu’on trouvera seront transpercés, tous ceux qu’on prendra tomberont sous l’épée. Leurs petits enfants seront écrasés sous leurs yeux, leurs maisons pillées, leurs femmes violées… [Les juifs] n’épargneront pas le fruit de leurs entrailles » (Traduction œcuménique de la Bible ou TOB, p. 797). Selon Osée (14, 1), « Samarie devra payer car elle s’est révoltée contre son Dieu : ils tomberont par l’épée, les nourrissons seront écrasés et les femmes enceintes éventrées » (p. 1130). Selon Nahoum (3, 6, 10), « Je te couvre d’ordures pour te flétrir et de toi, faire un exemple […] À son tour, [Ninive] fut déportée ; elle dut partir en captivité. À leur tour, ses bébés furent écrasés à tous les carrefours » (p. 1206). Selon le Psaume coté 136 ou 137, David, s’adressant au pays d’Edom, déclare : « Heureux qui saisira tes nourrissons pour les broyer sur le roc » (p. 1448). Selon Samuel (19, 25), le roi Saül donnera pour femme à David sa fille Mikal à la condition que David lui apporte « cent prépuces de Philistins [Palestiniens], pour tirer vengeance des ennemis du roi » ; David « abattit, parmi les Philistins [Palestiniens], deux cents hommes » et « apporta leurs prépuces, dont on fit le compte devant le roi » (p. 559). Quant au Livre d’Esther, il fait état de la «jubilation» qu’éprouvent les juifs à se venger. Grâce aux intrigues d’Esther et de Mardochée auprès de Xerxès, roi des Perses (Iraniens), Haman est pendu et toutes ses possessions remises à Esther, qui en confie l’administration à Mardochée, lequel, par la suite, deviendra « le second du royaume, après Xerxès » à la place de Haman. Puis Esther et Mardochée obtiennent en sus la permission pour les juifs de massacrer tous leurs ennemis : « En chaque province et en chaque ville où étaient parvenus l’ordonnance du roi et son décret, c’était joie et jubilation pour les juifs, c’était le banquet et la fête. Beaucoup de gens du pays se faisaient juifs, car la terreur des juifs tombait sur eux [comme la cagoule sur la tête du condamné à la pendaison] ». Ce sont les jours des Pourim (Destinées). Les dix fils de Haman sont, à leur tour, pendus. Les juifs tueront au moins 75 300 Perses. Et c’est ainsi qu’encore au XXIe siècle, chaque année, les juifs, s’échangeant des cadeaux, fêtent Pourim dans la liesse. On pourrait citer bien d’autres pages de la Bible où s’exprime une invitation au meurtre ou au massacre de masse. Quant au Talmud, il évoque Jésus condamné pour l’éternité à bouillir dans des excréments. Sur ce dernier point on se reportera à Der Babylonische Talmud [Gittin, V, VI, Fol. 57], Lazarus Goldschmidt, Jüdischer Verlag, Berlin 1932, p. 368, où l’expression employée est : «mit siedendem Kote». On peut également consulter The Babylonian Talmud [Seder NashimGittin, Fol. 57], publié sous la responsabilité éditoriale du rabbin Dr I. Epstein, Soncino Press, Londres 1936, p. 260-261, où l’expression employée est «with boiling hot excrement». Le culte de la violence dans la tradition et la pratique juives a fait l’objet de bien des publications d’auteurs juifs ou non juifs. L’un des derniers en date est Elliott Horowitz dans l’ouvrage qu’il a intitulé Reckless Rites: Purim and the Legacy of Jewish Violence [Rites imprudents : Pourim et l’héritage de la violence juive] (Princeton University Press, mai 2006, 344 p.). Des juifs s’inquiètent de voir ainsi « le peuple du Livre » rituellement fêter ces orgies de vengeance.

C’est à ce « peuple du Livre » que les Palestiniens ont actuellement à faire. On serait heureux d’entendre le Pape sur ce chapitre-là, lui qu’on voit si préoccupé de la violence des musulmans.

23 septembre 2006